Plusieurs jours après les révélations du New York Times et du New Yorker, qui ont donné la parole à de nombreuses femmes et actrices ayant toutes accusé le producteur Harvey Weinstein d'actes inappropriés et d'agression sexuelle, les voix se multiplient pour prendre position et dénoncer l'impunité et le silence qui entourent encore le harcèlement sexuel.
Dans une tribune publiée ce 15 octobre dans les colonnes du Journal du dimanche, Isabelle Adjani s'est ainsi exprimée pour évoquer "le système de prédation dans toute sa monstruosité" mis en lumière par la levée de l'omerta. "Ce qui était acceptable pour l'opinion sans être dit, devient inadmissible, insupportable, surtout dans un pays très puritain, en apparence, comme les Etats-Unis", confie-t-elle. Indignée, la comédienne dénonce tout haut ce qui est encore largement considéré dans le milieu. "Pour la plupart des gens, si une actrice doit coucher pour y arriver, ça reste naturel, voire normal, selon l'idée qu'il faut bien donner un peu de soi quand on veut obtenir beaucoup", a-t-elle expliqué.
Quand une actrice se fait séduisante, ce n'est pas pour se faire violer
A l'instar d'autres actrices françaises comme Léa Seydoux, Isabelle Adjani a également rappelé que le comportement d'Harvey Weinstein peut également se retrouver dans le cinéma français. Dans la suite de sa tribune, elle dénonce les méthodes "sournoises" de certains hommes de pouvoir qui "prétextent le jeu de la séduction, l'une des armes de l'arsenal de défense des prédateurs et des harceleurs. De ceux qui prétendent que ces femmes ne sont pas si innocentes, car elle-mêmes se prêtent à ce jeu qui fait partie de notre culture", a-t-elle ajouté. Et de répéter ce qu'elle a "souvent entendu" dans les maisons de production ou chez les décideurs : "Toutes des s***pes, toutes des p**es de toute façon, ces actrices !"
Scandalisant mais véritablement ancré dans une industrie, les pratiques douteuses apparaissent comme un "jeu" pour les prédateurs sexuels. "Mais ce n'est pas un jeu et il est grand temps de rappeler que dans libertinage il y a liberté et que quand une femme dit non, elle dit non, que son corps lui appartient et qu'elle seule est libre d'en disposer. Quand une actrice se fait séduisante pour décrocher un rôle, ce n'est pas pour se faire violer ! (...) Laissons savoir à ses messieurs les harceleurs que les actrices, tout comme les ouvrières, les agricultrices ou les ingénieures, les commerciales ou les institutrices, les mamans ou les p*tains, sont toutes libres de b**ser, libres d'avorter. Et libres de parler !", a-t-elle conclu.
Je suis tombée de haut
Une femme ayant eu l'occasion de travailler avec Harvey Weinstein s'est également exprimée dans les colonnes du JDD pour faire part de son choc et de sa déception. Il s'agit d'Albane Cleret, directrice de l'agence de communication éponyme spécialisée dans l'organisation d'événements, notamment lors du Festival de Cannes. "Je suis tombée de haut. Je savais, comme tout le monde dans le milieu du cinéma, que cet homme avait une tendance un peu lourde à draguer, un peu vulgaire et déplacée dans sa façon de faire. (...) Je ne pensais pas que c'était à ce point là", a-t-elle déclaré. Dans la lumière du scandale, Albane Cleret, qui assure n'avoir jamais subi "aucun propos déplacé", se demande "si tout ça est vraiment une découverte et si Harvey Weinstein n'est pas un bouc émissaire pour les autres. A mon grand désespoir en tant que femme, cela existe depuis la nuit des temps. (...) Ne soyons pas naïves, nous savons que ce genre de comportement peut exister chez les hommes de pouvoir. Mais cela n'enlève rien à mon dégoût", a-t-elle déclaré.