Icône française aux 5 César, Isabelle Adjani revient au sommet avec le film Carole Matthieu, réalisé par Louis-Julien Petit. Elle incarne, avec l'intensité de jeu qu'on lui connaît, un médecin du travail confronté à la terrible souffrance d'employés. Il s'agit de l'adaptation du livre Les Visages écrasés de Marin Ledun, dont elle a acheté les droits. Car l'actrice est aussi productrice de cette oeuvre destinée à la télévision pour Arte et au cinéma - à l'image de La Journée de la jupe dont elle est aussi l'héroïne. Elle en parle pour le magazine Elle avec une passion non dissimulée.
"Une amie de mon frère [Eric, décédé en 2010], qui travaillait dans les télécoms, s'est suicidée de manière atroce. Moi, je lui dédie Carole Matthieu, mais il aurait fallu le dédier à tant de personnes...", explique dans Elle Isabelle Adjani. La violence sociale touche depuis le plus jeune âge la comédienne : "Depuis le tournage, des images ont ressurgi, celles du patron du garage qui employait mon père en train de hurler ce nom d'Adjani, comme si c'était celui d'un chien. Je dois dire que d'avoir vu ce bourgeois repu, qui portait un chapeau à plumes, humilier mon père, a cristallisé très tôt ma révolte devant l'injustice et l'inégalité."
Le combat n'est en effet pas terminé, même dans le milieu du cinéma. Car, si elle prend soin de ne pas comparer gratuitement le décor du film et celui du cinéma - "ce serait indécent" - elle souligne que pour les femmes victimes de harcèlement sur un plateau de tournage, les choses sont complexes : "Une actrice craint de ne plus être engagée ou de passer pour une fille à reproches." La sensible Isabelle Adjani observe et est touchée par le monde qui l'entoure. Face à sa violence, elle peut compter sur la présence rassurante de ses deux fils, Barnabé et Gabriel-Kane, dont les pères respectifs sont Bruno Nuytten et Daniel Day-Lewis.
Dans Carole Matthieu (en salles le 7 décembre), présenté au Festival d'Angoulême, Isabelle Adjani est un médecin du travail dans une entreprise aux techniques managériales écrasantes. Elle tente en vain d'alerter sa hiérarchie des conséquences de telles pratiques sur les employés. Lorsque l'un d'eux la supplie de l'aider à en finir, Carole réalise que c'est peut-être son seul moyen de forcer les dirigeants à revoir leurs méthodes.