Arte poursuit son exploration de la mode avec Loïc Prigent et proposera demain soir de suivre les dernières heures de préparation du défilé Haute Couture Jean-Paul Gaultier dédié au cinéma.
Après nous avoir emmenés dans les coulisses de la maison Fendi co-pilotée par Silvia Fendi et Karl Lagerfeld, les caméras de Loïc Prigent nous ouvrent les portes de la "maison" Gaultier, de son bâtiment, où toutes les activités sont concentrées sur plusieurs étages.
L'enfant terrible de la mode, comme on aime le surnommer, qui a su très tôt se frayer un chemin en assumant sa différence, accueille le reporter avec le sourire et nous dévoile son travail minutieux, son sens du détail, et propose de découvrir "sa famille", ses mannequins, à qui il accorde une attention toute particulière lors des castings.
Car Gaultier se veut avant-gardiste. Et ne choisit jamais ses mannequins par hasard.
C'est lui qui a propulsé Laetitia Casta alors que le métier la trouvait trop grosse. C'est lui qui a fait de Farida Khelfa sa muse, ayant l'audace de faire défiler un mannequin d'origine maghrebine, une toute nouvelle beauté métissée, loin des diktats en place. Préférant les femmes "de la ville" et identifiables aux tops parfaits, Jean-Paul Gaultier parvient à saisir la personnalité de ses modèles pour en exploiter tous les atouts.
Il compte parmi les premiers à faire défiler des mannequins noirs, réinvente ses show à chaque collection, et n'hésite pas à mêler, en véritable homme du spectacle, la danse, les numéros de cirque et la musique. Il fera ainsi, en 2007, une ouverture spectaculaire lors de son défilé puisque le mannequin Coco Rocha, danseuse de formation, aura l'honneur d'ouvrir le bal en dansant sur un air de musique écossaise.
Issu d'un HLM de banlieue, le jeune Jean-Paul n'est pas familier avec les règles. Il arrête l'école en première et poursuit ses rêves de gosse sur sa peluche Nana offerte par sa tante. Elle sera le premier mannequin de JPG. Grâce à sa grand-mère qui lui transmet son goût pour les beaux vêtements et qui l'initie à la mode, le créateur en herbe développe son sens du style et signe, en 1964, son premier book regroupant quelques croquis déjà dignes des pros.
Son ascension est fulgurante. Gaultier est le roi de la mode dans le tout-Paris et les mannequins se pressent pour défiler à ses côtés. C'est ainsi qu'en 1995, Carla Bruni a fait la queue, comme tout le monde, afin d'être castée par le grand Gaultier qui ne recherchait, à l'époque, que des rousses. "Je l'avais reconnue, je ne pouvais pas lui dire qu'elle ne convenait pas, j'étais coincé, ne pouvais pas faire autrement", apprend-t-on dans le livre qui lui est consacré, Jean-Paul Gaultier, punk sentimental, d'Elizabeth Gouslan. Treize ans plus tard, pour épouser son chéri Nicolas Sarkozy , Carla Bruni choisira une robe du créateur qu'il avait imaginée pour Hermès. Car oui, celui qui est à l'origine du concept du "Boy Toy", du bustier conique ou encore de la marinière, est également, depuis 2004, le directeur du prêt-à-porter femme de la maison prestigieuse.
Fan de télé, il n'hésite pas à puiser quelques idées dans la petite lucarne. Amateur d'émissions comme Un dîner presque parfait ou encore X-Factor, Jean-Paul est devenu un monument de la mode parisienne. Ami des stars, créateur de fabuleux costumes pour Madonna qu'il rencontre à la fin des années 80, Kylie Minogue ou encore Mylène Farmer, il vous ouvre les portes de ses ateliers avec la même authenticité. Celle qui a fait son succès il y a plus de 25 ans.
On verra demain soir, à 22h00, un Jean-Paul Gaultier souriant, stressé, anxieux, passionné. On ne verra pas l'homme écorché, affaibli par la disparition de son grand amour Francis à la fin des années 80, qui a su s'imposer parfois contre tous. Pour cela, et pour découvrir son incroyable itinéraire, il faudra lire Jean-Paul Gaultier, Punk Sentimental aux éditions Grasset (paru le 6 janvier 2010), d'Elizabeth Gouslan. Vous saurez tout, tout, tout sur le plus déjanté des couturiers.