Qui aime bien châtie bien ? Alors que la famille royale britannique n'a jamais été aussi populaire, le prince William et Kate Middleton servant à merveille la cause, la BBC semble prendre un malin plaisir à jouer les trouble-fête...
Quelques jours à peine après avoir heurté la sensibilité d'une partie du public par sa négligence et sa désinvolture concernant le traitement du baptême de l'enfant-roi George de Cambridge, la société historique de télévision britannique s'est de nouveau retrouvée sous le feu roulant des critiques après avoir osé une mauvaise blague au sujet du prince Harry.
Soldat au service de la nation au sein de la RAF, ambassadeur passionné des associations d'aide aux anciens combattants, philanthrope amoureux de l'Afrique, athlète multitalent qui milite pour la pratique du sport à l'école, oncle appliqué pour le prince George et jeune homme à la décontraction ultraséduisante, les qualités du fils cadet du prince Charles et de Lady Di ne sont pas rares. Mais ses défauts, dont son goût prononcé pour la fête qui lui a notamment fait vivre une bien mauvaise passe en 2012, photographié nu à Las Vegas, intéressent bien plus les satiristes...
Et ceux-ci n'y vont pas avec le dos de la cuillère : vendredi soir, dans le programme satirique Have I Got News For You (HIGNFY), qui n'a pas manqué de s'emparer du baptême royal comme sujet tout trouvé, il a carrément été suggéré que le petit-fils de la reine Elizabeth II sniffait de la cocaïne ! Shocking ! Lisant sur un prompteur les noms des parrains et marraines du bébé, la comédienne primée Jo Brand, présentatrice invitée régulière du show, en est arrivé à celui d'Hugh van Cutsem - un des quatre fils du meilleur ami du prince Charles récemment décédé, et ami intime des princes William et Harry, mais qui n'a pas été désigné comme parrain de George - et l'a écorché en "van cuts 'em", déclarant : "Je présume que c'est un surnom, comme dans "Hugh la coupe et Harry la sniffe"."
En entendant la blague osée, Paul Merton, présentateur du programme, semble blêmir à vue d'oeil, tandis que son compère Ian Hislop lâche (avec ou sans humour, difficile à dire) : "Est-ce qu'on n'a plus d'avocats ?" Le fait est que la chaîne a visiblement cautionné la blague de nature diffamatoire, puisque Have I Got News For You est enregistré le jeudi, ce qui laissait le temps de faire éventuellement les coupes nécessaires. Jo Brand, pour sa part, connue autant pour ses convictions républicaines et sa sensibilité travailliste que pour son humour récompensé par plusieurs pris, a expliqué samedi n'avoir pas écrit la vanne mais a assumé sa "culpabilité d'une certaine manière" pour l'avoir sciemment lue. Le comble, c'est que la BBC a indirectement prouvé son désintérêt pour le baptême en utilisant (en connaissance de cause ?) le nom de Hugh van Cutsem par erreur, puisque celui-ci n'est pas parrain du prince George. Circonstance aggravante, le jeune homme est en deuil de son père, il se serait peut-être bien passé de ce trait d'humour grinçant à ses frais...
Les réactions ne se sont pas fait attendre. Ancien chef d'état-major (à l'époque où le prince Harry avait été pour la première fois envoyé en Afghanistan), Lord Dannatt s'est insurgé, a relevé le Daily Telegraph : "C'était peut-être dit sur le ton de la blague, mais l'insinuation est outrageante. C'est une blague très maladroite et des plus inappropriées. L'Armée effectue des contrôles antidrogue de manière aléatoire. La drogue et le fait d'être un pilote d'hélicoptère de combat ne vont pas bien ensemble."
Même son de cloche du côté de la ministre de la Défense, Anna Soubry, première femme à occuper la fonction : "C'est honteux, nul, consternant et déplacé. Le prince Harry fait un travail remarquable dans l'Armée et va bien au-delà en aidant les blessés de guerre et vétérans. Jo Brand n'aurait pas dû s'abaisser à ce niveau et la BBC comme elle devraient présenter des excuses. C'est vraiment une attaque facile sur quelqu'un qui ne peut pas répliquer, d'autant qu'ils savent qu'il n'y aura pas de poursuites. Le programme n'est pas en direct, cela aurait dû être coupé. J'attends de la BBC qu'elle explique clairement pourquoi elle a permis cela."
La journaliste et chroniqueuse royale Penny Junor a partagé cet avis, tandis que James Wharton, un soldat gay auquel le prince Harry vint un jour en aide alors qu'il était victime d'une agression homophobe dans son régiment, a déploré l'impact sur l'image du prince auprès de la jeunesse. En matière de drogue, le seul passif du prince Harry est d'avoir avoué à son père le prince Charles, lorsqu'il avait 16 ans, avoir fumé du cannabis avec des jeunes gens plus âgés à Highgrove.
Du côté de la production de l'émission irrévérencieuse, qui a reçu en 2011 un prix d'honneur pour l'ensemble de son oeuvre, et de la chaîne, on a cherché à minimiser l'incident. Jo Brand, qui milite pour l'abolition de la monarchie au sein du mouvement Republic, s'est montrée plus ferme, déclarant ne pas comprendre le scandale que la plaisanterie provoque et affirmant ne pas avoir l'intention de présenter des excuses.