Et c'est justement concernant le scénario du film qu'il existe aujourd'hui un litige. En effet, le scénariste (et réalisateur) Martin Provost et la société TS Productions (qui a financé le long métrage) sont accusés de plagiat par Alain Vircondelet, docteur en histoire de l'art et spécialiste avéré de Séraphine Louis.
L'historien a effectivement soutenu une thèse de doctorat consacrée à Séraphine Louis au milieu des années 80 et a publié, en 1986, une biographie intitulée Séraphine de Senlis, aux Editions Albin Michel.
M. Vircondelet et son éditeur avancent, preuves à l'appui, que de nombreux passages du long métrage "sont la reproduction servile" d'extraits de Séraphine de Senlis. Pour sa part, TS Productions, via son avocat, "conteste expressément l'existence d'une contrefaçon", prétextant que les passages litigieux trouvent leur origine "dans des ouvrages antérieurs, notamment ceux de Jean-Pierre Foucher (1968) et Wilhelm Uhde (1949), le pygmalion de Séraphine." Cependant, de nombreuses phrases sont présentes à l'identique dans le livre d'Alain Vircondelet et dans le scénario de Martin Provost.
Dans ces conditions, Alain Vircondelet et son éditeur ont attaqué en justice Martin Provost et la société de production du film. Ils réclament 600 000 euros de dommages et intérêts et demandent que l'exploitation du film soit interdite aussi bien en France qu'à l'étranger.
L'audience de cette affaire s'est tenue aujourd'hui au tribunal de grande instance de Paris. Durant celle-ci, Me Christophe Bigot, l'avocat d'Alain Vircondelet, a déclaré que le scénario du film "avait été écrit avec le livre de M. Vircondelet sur la table. C'est une contrefaçon absolument caractérisée, il y a des reprises mot pour mot de l'ouvrage", avant de préciser : "35 occurrences de contrefaçon." Et d'enfoncer définitivement le clou avec un exemple précis uniquement présent dans le livre : "M. Vircondelet a imaginé Séraphine peignant avec de la terre molle et du sang, une image reprise purement et simplement dans le film : le plagiaire est pris la main dans le sac !"
De son côté, la défense, représentée par Me Yves-Henri Nédélec, rétorque qu'il s'agit tout simplement "d'un mauvais procès", évoquant l'inspiration de son scénario par des ouvrages antérieurs et des "rencontres préparatoires au film". Il met également en lumière la notion de non-possession d'un sujet vivant : "Le raisonnement de M. Vircondelet est un syllogisme intenable, disant que 'Séraphine c'est moi', donc pour un film il faut passer par lui. Mais ce n'est pas le cas." Avant de conclure : "C'est un procès de censure, on veut la mort du film."
S'il est avéré que certains passages du film sont directement tirés de l'ouvrage d'Alain Vircondelet - ce qui semble un peu être le cas -, la société de production devra passer à la caisse, et le sort du film sera dès lors entre les mains de la justice.
Le verdict sera rendu le 26 novembre 2010.
Adam Ikx