Alexandre Brasseur n'est pas uniquement le fils de Claude et le petit-fils de Pierre et Odette Joyeux. Acteur et comédien confirmé, il est sur un bateau de croisières pour le film de Pascale Pouzadoux lorsqu'il accepte de répondre à quelques-unes de nos questions concernant la saga de France 2 (5x90 minutes) dans laquelle il campe le rôle principal.
Comment vous êtes-vous retrouvé sur le projet de La Maison des Rocheville ?
Alexandre Brasseur : D'une manière hyper simple : un rendez-vous ! En réalité, il se trouve que le réalisateur Jacques Otmezguine, son épouse la productrice Nelly Kafsky et moi sommes allés voir Chloé Lambert qui jouait La Nuit des Rois de Shakespeare. Déjà sur ce projet, ils m'ont repéré et ont certainement dû se dire : "Brasseur serait pas mal pour le rôle de Victor de Rocheville". Huit jours après, ils m'ont appelé ! Comme quoi, pour plein de bonnes raisons, c'est vraiment bien d'aller au théâtre !
Combien de temps a duré le tournage ?
AB : De janvier à juin à Bordeaux et dans sa région.
C'est très long... Comment cela se passe-t-il dans ces cas-là ?
AB : Il faut savoir gérer. Ce n'est pas toujours évident. Quand on a des enfants, une épouse, il faut savoir garder le contact, rester proche malgré la distance. En général, je rentrais le week-end mais parfois, lorsque l'on travaillait le samedi, il m'arrivait de ne pas faire d'aller-retour. Ma femme travaille et les enfants sont à l'école donc ce n'était pas toujours facile pour eux de venir. Cela fait partie du boulot. A un moment donné, c'est devenu un peu pénible, donc la production m'a permis de rentrer pour passer du temps avec eux.
Il y a un casting incroyable. Combien de personnes ont participé au tournage ?
AB : Il y a une vingtaine de rôles majeurs, 150 décors, et environ 1 500 figurants qui se sont succédé au long des six mois de tournage. Il faut la faire vivre cette saga. Elle se passe de 1893 jusqu'aux évènements de mai 1968 donc forcément, il faut qu'il y ait du monde ! Mais en même temps, comme au début du deuxième épisode alors que l'action se passe pendant la première guerre mondiale dans les tranchées, Otmezguine, qui est pour moi un grand Monsieur, a réussi à recréer une véritable ambiance de guerre alors que sur le tournage on était... trois ! Comme quoi il peut y avoir 150 figurants ou pas, à partir du moment où un réalisateur sait manier sa caméra et raconter une histoire comme lui sait le faire, il peut vous faire croire beaucoup de choses !
Parlez-nous de vos partenaires...
AB : Chloé Lambert (Mathilde) est une amie proche. Nous avons joué le rôle d'un couple qui adopte, dans Tombé du Ciel pour France 3, puis au théâtre pendant un an sur Mon père avait raison de Guitry (pièce jouée 300 fois et qui lui a valu le prix Raimu de la révélation en 2007, ndlr). Quant à Virginie Desarnauts, qui joue ma femme Eugénie, et Jérémie Covillault (Fabio), nous nous sommes rencontrés sur ce tournage. Et je peux dire que pour moi, tourner avec eux a été une grande chance car ce sont des gens absolument délicieux et généreux avec qui il m'a été très agréable de travailler. Et c'est important de le souligner car quand on part pour six mois de tournage, avoir des partenaires de qualité vous aide à tenir le coup parfois. Nous avons pu travailler en toute simplicité mais aussi dîner ensemble, aller au cinéma, voir une expo... Des moments simples de la vie qui font aussi partie du quotidien des acteurs quand ils ne tournent pas !
Judith Magre, la voix du domaine de Ville Blanche, est-elle venue sur le tournage pour se rendre compte de l'atmosphère ?
AB : Elle n'est pas du tout venue. Cela peut paraître bizarre mais c'est vrai ! Même si sa voix peut paraître imprégnée par l'histoire comme nos personnages le sont, c'est grâce à Jacques Otmezguine : c'est notre fil conducteur. Jacques s'est tellement impliqué dans la mise en scène, la direction, l'écriture, les dialogues qu'il nous a, à tous, permis de nous embarquer dans l'aventure des Rocheville. Nous lui devons tous énormément. C'est quelqu'un de rare.
Incarner plusieurs personnages, subir la transformation physique due au temps, n'est-ce pas troublant ?
AB : Les séances de maquillage pouvaient parfois durer deux heures. Poser des cosmétiques plastiques, clairsemer et blanchir les cheveux... Mais ce que j'avais oublié c'est que maquillage implique... démaquillage ! C'est très long et c'est très désagréable. Ça tire, ça fait comme une sorte de peeling. Le fait d'amener mon personnage sur sa soixantaine ne m'a pas déplu, au contraire. Cela m'a apporté une espèce de sérénité, un certain aplomb. J'ai trouvé en revanche beaucoup plus complexe de jouer mon personnage à l'âge de 18-19 ans. Et pourtant, j'ai eu 18 ans (il n'y a pas si longtemps !) mais j'avais peur de tomber dans la caricature.
Ville Blanche a une sorte pouvoir magique... Avez-vous ressenti une telle chose sur le tournage ? Dans la vraie vie ?
AB : Non, pas plus que ça en ce qui concerne Ville Blanche. Mais en revanche, j'ai déjà remarqué que les murs de certains endroits sont chargés d'histoires, spécialement dans les vieux théâtres. J'y ressens la présence des anciens grâce à des objets, ou bien cette même scène sur laquelle on déambule. Il y a quelques années, je passais une audition au théâtre Antoine, là où, en 1951, mon grand-père Pierre Brasseur a joué Le diable et le Bon Dieu de Jean-Paul Sartre mis en scène par Louis Jouvet, une pièce majeure du répertoire français. Le directeur du théâtre m'a alors proposé de visiter les lieux et m'a emmené sur le gril, la partie la plus haute d'un théâtre, où il conservait une partie du décor de cette pièce. Et là, il m'a montré une vieille croix grise, en papier mâché, super banale. Cet objet qui j'insiste n'avait vraiment aucun intérêt, m'a fait ressentir la présence de Pierre. J'ai été retenu pour le rôle et chaque soir, avant de jouer Locandiera, instinctivement, je montais sur le gril pour aller voir la croix... Cela peut paraître un peu mystique mais les fantômes des anciens veillent dans les vieux théâtres.
On voit le jeune Victor de Rocheville grandir ? Vous-même héritier d'une grande lignée d'artistes, n'auriez-vous pas aimé que votre fils Louis campe votre personnage jeune ?
AB : J'adore ce personnage, j'adore cette histoire, j'adore cette opportunité mais ce n'est pas ma vie. Et puis je trouve mon fils trop jeune pour faire ce genre de choses. Il a 12 ans et tout le temps pour décider de son avenir. Je préfère qu'il soit concentré sur ses études et son année de 5e plutôt que de faire l'acteur avec son père ! Moi-même qui suis fils et petit-fils d'acteurs, à son âge je n'étais pas trop branché par ce métier. Qu'il vive les choses légèrement sans vouloir forcément dès maintenant savoir ce qu'il voudra faire plus tard. Et puis, en tant que père, cela ne m'aurait pas plus branché que ça de tourner avec mon fils.
Vous montez beaucoup (et bien) à cheval dans La maison des Rocheville. Est-ce une vieille passion ou vous y êtes mis pour ce tournage ?
AB : Je monte à cheval grâce à ma fille. Elle est complètement folle d'équitation, contrairement à moi qui, au même âge, avais une peur bleue des chevaux. Depuis l'an dernier, j'ai décidé de monter avec elle (car j'avoue que je m'ennuyais à l'attendre) et maintenant on monte tous ensemble avec ma femme et mon fils. Sur un tournage, avec les caméras, les axes, on ne fait pas ce qu'on veut avec nos chevaux. Il faut partir au bon moment, s'arrêter au bon endroit... Nous avons eu la chance de partir faire des stages de 4-5 jours chez un maître équestre Frédéric Sabraba, qui a un immense haras en Touraine avec des chevaux espagnols magnifiques. Il nous a tout appris car ces chevaux sont particulièrement imposants et ne sont pas forcément évidents à manipuler. Pourtant, ils sont tellement bien dressés que si on tire un peu trop sur les rênes, ils s'allongent ! Que vous me disiez que j'ai une bonne position à cheval me fait très plaisir et je vais d'ailleurs le dire à mes enfants qui en général n'arrêtent pas de se moquer de moi dès que je suis sur un cheval !
Quels sont projets ?
AB : J'ai la chance de faire une participation dans le long métrage de Pascale Pouzadoux avec Line Renaud, Marilou Berry, Nora Arnezeder qui va sortir au mois d'avril, La croisière. Je suis très fier d'y faire un petit clin d'oeil car c'est la première fois qu'en France on fait un film sur ce thème et aussi car c'est un film de femmes, écrit par des femmes, réalisé par une femme ! Et c'est très agréable. A part ça, j'ai lu un magnifique scénario d'un très grand réalisateur mais par superstition je n'en dirai pas plus ! Mais, pas de projet de théâtre pour le moment.
Et comment va Claude, votre papa ?
AB : Il va très bien. Il a passé ses vacances dans le midi. Il est d'autant plus content qu'en rentrant de vacances, il est reparti à la Rochelle pour le festival de la fiction où le téléfilm dans lequel il joue avec François Berléand et Patrick Chesnais, a reçu le prix de la meilleure comédie, Vieilles Canailles pour TF1.
Merci Alexandre...
Retrouvez La Maison des Rocheville dès le 28 septembre sur France 2
Propos recueillis par Marine Trévillot