Dominique Strauss-Kahn est actuellement entendu par la police de Lille sur son rôle dans l'affaire de proxénétisme dite du Carlton de Lille. Conduit par son chauffeur, l'ancien directeur général du Fonds monétaire internationale (FMI) est arrivé un peu avant 9h à la caserne de gendarmerie de Lille récemment rénovée. Il est entendu sous le régime de la garde à vue pour "complicité de proxénétisme" et "recel d'abus de biens sociaux". L'avocate de DSK, Me Frédérique Baulieu du cabinet de Me Henri Leclerc, est sur place depuis 10h du matin. Elle l'accompagnera durant toute sa garde à vue.
Être interrogé sous le régime de la garde à vue est le signe de l'importance des soupçons qui pèsent sur Dominique Strauss-Kahn. Les enquêteurs l'interrogeront au sujet de soirées libertines organisées à Lille, mais aussi à Washington et à Paris. L'interrogatoire peut durer 48 heures ; dans ce cas, il dormirait sur place, d'autant que cette durée peut être prolongée si besoin jusqu'à 96 heures. L'objectif pour les enquêteurs est de découvrir si oui ou non, DSK savait que les jeune femmes qui participaient à ses soirées étaient des prostituées, même occasionnelles. Car ces prostituées ou escort-girls, ainsi que les voyages et les chambres d'hôtel dont bénéficiait DSK étaient payés avec l'argent "détourné" par Fabrice Paszkowski, responsable d'une société de matériel médical, et David Roquet, ancien directeur d'une filiale du groupe BTP Eiffage. Tous deux mis en examen dans cette affaire, ils ont effectué plus de trois mois de prison. Huit personnes au total ont été mises en examen dans ce dossier.
Dans la ligne de mire de la justice, notamment un voyage à Washington du 11 au 13 mai 2011, organisé par MM. Roquet et Paszkowski, auquel participaient des jeunes femmes présentées comme des secrétaires de la société Eiffage. Ce petit voyage s'est terminé la veille de l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn dans l'affaire du Sofitel de New York. Affaire dont le volet pénal a été refermé par la justice américaine.
D'autre part, DSK devrait également, concomitamment à ce dossier, être interrogé par les policiers de l'IGPN ( la police des polices) - deux inspecteurs sont aussi arrivés ce matin dans les locaux de cette ancienne gendarmerie désaffectée - puisque qu'au moins un important personnage, le commissaire divisionnaire Jean-Christophe Lagarde, chef de la Sûreté départementale du Nord, est impliqué. Ce commissaire, très proche de DSK, a depuis été mis en examen pour "proxénétisme aggravé en bande organisée et recel d'abus de biens sociaux" et suspendu de ses fonctions. D'autres policiers lillois ont également été entendus dans ce volet "corruption de fonctionnaire possible" de l'affaire. 48 heures de garde à vue (mais pas moins) ne seront pas de trop pour poser toutes les bonnes questions et obtenir (ou pas) toutes les bonnes réponses...
Dans l'affaire du Carlton, Dominique Strauss-Kahn a souhaité être entendu par la police dès que son nom est apparu dans la presse. En octobre, il souhaitait déjà mettre fin "aux insinuations et extrapolations hasardeuses et encore une fois malveillantes". Via la plume de son biographe Michel Taubmann, DSK a fait savoir qu'il ne niait pas les soirées libertines, mais ne supportait pas que son nom soit attaché à une affaire de prostitution : "C'est une accusation terrible. Dans la presse, on associe mon nom à la prostitution. C'est insupportable. J'ai participé à des soirées libertines, c'est vrai. Mais d'habitude, les participantes à ces soirées ne sont pas des prostituées."
Après cet interrogatoire, qui s'annonce épuisant et musclé, Dominique Strauss-Kahn pourrait être mis en examen ou conserver, selon le Huffington Post français, son statut de témoin assisté, à mi-chemin entre le simple témoin et la mise en examen. Autre hypothèse avancée par nos confrères : "Encore moins probable, à en croire les pronostics des avocats et les pièces du dossier qui ont fuité au cours de l'instruction, Dominique Strauss-Kahn pourrait tout simplement être mis hors de cause." Il risque jusqu'à sept ans de prison.
Rappelons que le Huffington Post a été lancé en France le 23 janvier avec Anne Sinclair pour directrice éditoriale. L'épouse de Dominique Strauss-Kahn promettait que l'affaire qui secoue son couple serait traitée comme les autres : "C'est très clair, je l'ai dit à toute mon équipe, ils le savent depuis le premier jour. C'est la première chose que je leur ai dite : tout ce qui doit faire la une fera le une", disait-elle. Ce mardi matin, le placement en garde à vue de DSK fait la une du Huff' Post, avec un grand dossier sur les tenants et les aboutissants de l'affaire. Un dossier signé du journaliste politique Geoffroy Clavel.
Rappelons que tous les protagonistes de cette affaire sont supposés innocents jusqu'au jugement définitif.