L'audience n'a duré que dix minutes. C'est le temps qu'il a fallu au juge Douglas McKeon pour confirmer la signature d'un accord financier au contenu confidentiel entre Dominique Strauss-Kahn et la femme de chambre qui l'accusait d'agression sexuelle. Le juge a précisé que les négociations avaient commencé "plus tôt dans l'année" et s'étaient intensifiées depuis le 28 novembre. Il s'est ensuite laissé gagner par l'esprit de Noël : "J'ai développé beaucoup d'affection pour vous tous et j'ai appris à connaître Mme [Nafissatou] Diallo durant le temps que j'ai passé avec elle", a-t-il déclaré, avant de souhaiter de "joyeuses fêtes à tous".
"Si vous touchiez beaucoup d'argent..."
Dominique Strauss-Kahn n'était pas présent. Nafissatou Diallo l'était. Elle n'était plus apparue en public depuis l'été 2011, où elle avait raconté sa version des faits à la télévision et à l'occasion d'une conférence de presse. Elle portait un pantalon et une veste noirs, un foulard gris sur les cheveux. Elle n'a pas prononcé un mot durant l'audience, mais en sortant, elle a tenu à remercier brièvement "tous ceux qui [l]'ont soutenue à travers le monde" : "Je remercie Dieu et que Dieu vous bénisse tous."
L'avocat de Nafissatou Diallo, le coriace Kenneth Thompson, s'est adressé à la presse, principalement des journalistes français, en quittant le tribunal du Bronx : "Mme Diallo est une femme courageuse qui n'a jamais perdu confiance dans notre système judiciaire. Avec ce règlement, elle peut maintenant continuer sa vie." Selon les spécialistes, DSK a pu verser entre 3 et 10 millions de dollars à Nafissatou Diallo pour mettre fin aux poursuites. Un joli pactole pour "continuer sa vie". Depuis les faits, en mai 2011, Nafissatou Diallo est restée salariée du Sofitel de Manhattan même si elle n'est pas retournée y travailler.
Le juge Douglas McKeon s'est exprimé en exclusivité sur RTL et s'explique sur la décision de maintenir le montant de cet arrangement secret : "Ce n'est pas quelque chose que j'encourage. Mais dans ce cas, j'ai été convaincu que dévoiler le montant de l'accord au monde entier était nuisible à Mme Diallo. (...) Si vous touchiez beaucoup d'argent, vous n'auriez pas forcément envie que tout le monde autour de vous connaisse la somme, ni les détails de l'accord. Elle avait des inquiétudes légitimes."
DSK serein à Paris... mais attendu à Lille
Durant l'audience, Dominique Strauss-Kahn dînait à Paris avec quelques amis dont l'élue socialiste Michèle Sabban, qui parlait ce mardi 11 décembre sur RTL. Elle estime toujours que DSK est tombé dans un piège. Elle ne l'imagine pas revenir en politique : "Je pense que Dominique Strauss-Kahn a tourné la page de la vie politique. La vie politique française, il l'observe comme tout un chacun, mais je pense qu'il veut être utile pour aider les autres. (...) voire même donner des conseils sur le plan économique." Elle dit ne pas savoir si DSK est l'éminence grise de l'actuel ministre de l'Économie Jérôme Cahuzac, comme le veulent certains bruits de couloir.
Libéré de cette affaire new-yorkaise, Dominique Strauss-Kahn base désormais sa nouvelle vie sur sa formidable réputation d'économiste. L'ancien patron du FMI a participé à quelques conférences à l'étranger : "C'est un rôle qui me convient bien, déclarait-il. Et que j'entends tenir dans les années qui viennent." Il a par ailleurs créé une société de conseil à Paris. Reste son autre réputation : "Le jugement moral que certains portent sur ma vie privée n'autorise pas tous les abus", rappelait-il en octobre dans Le Point.
L'affaire new-yorkaise définitivement classée, celle dite du Carlton de Lille est toujours d'actualité. Mis en examen pour "proxénétisme aggravé en bande organisée", Dominique Strauss-Kahn risque gros. Ses avocats ont demandé la nullité de la procédure. La justice doit se prononcer le 19 décembre...