Un accord financier entre Dominique Strauss-Kahn et la femme de chambre du Sofitel de New York qui l'accusait d'agression "violente et sadique", Nafissatou Diallo, vient d'être signé lors d'une courte audience au tribunal du Bronx devant le juge Douglas McKeon, ce lundi 10 décembre. Le magistrat a annoncé au début de l'audience que les parties étaient parvenues à un accord négocié, dont les termes sont évidemment confidentiels, qui met fin aux poursuites civiles contre DSK. L'audience était prévue à 14 heures (20 heures à Paris). Elle s'est déroulée en l'absence de DSK et en présence de Nafissatou Diallo, à qui il a été demandé d'approuver chaque point de l'accord financier conclu entre les parties et négocié depuis des mois. Cet accord met fin au volet civil de l'affaire du Sofitel et à 18 mois de procédure.
Le montant de l'accord passé entre Dominique Strauss-Kahn et Nafissatou Diallo n'a pas été révélé aux journalistes qui faisaient le pied de grue devant le tribunal new-yorkais. Le Monde avançait le chiffre de 6 millions de dollars, un montant qualifié de "complètement inexact" par l'avocat de DSK, William Taylor. Il est pourtant très crédible selon l'avocat et ancien procureur Mathew Galluzzo, cité par l'AFP : l'ancien patron du FMI pourrait avoir à verser "entre 3 et 10 millions dollars, plus probablement autour de cinq", a estimé cet expert. Les règlements à l'amiable dans les procédures civiles - qui visent à obtenir des dommages et intérêts aux États-Unis - concernent presque 90% des dossiers. Ces accords financiers ne sont pas des aveux de culpabilité, mais ils évitent aux accusés d'avoir à s'expliquer devant la justice. Ils évitent également la tenue de procès longs et coûteux.
Un feuilleton sans pareil
Arrêté le 14 mai 2011 à l'aéroport JFK de New York, Dominique Strauss-Kahn est accusé par Nafissatou Diallo de l'avoir sexuellement agressée quelques heures plus tôt dans la chambre 2086 du Sofitel à Manhattan. Incarcéré quatre nuits, inculpé, puis assigné à résidence à New York jusqu'en juillet, Dominique Strauss-Kahn est contraint de démissionner du FMI. Le destin présidentiel que beaucoup lui promettaient s'évanouit. Le 6 juin, il plaide non coupable. Le 25 juillet, Nafissatou Diallo raconte "sa vérité" sur la chaîne de télévision ABC et l'on découvre son visage. DSK ne peut compter que sur ses proches et sa compagne Anne Sinclair, d'une dignité absolue face au scandale. L'affaire Tristane Banon jette de l'huile sur le feu.
Les choses s'accélèrent en août. Le 8, voyant le vent tourner au pénal, Nafissatou Diallo lance l'offensive au civil en portant plainte pour "agression violente et sadique" afin d'obtenir des dommages et intérêts. Quelques jours plus tard, les poursuites au pénal sont abandonnées par le procureur en raison des nombreux mensonges de la plaignante sur son passé, ce qui entame sérieusement sa crédibilité.
Le 4 septembre, Dominique Strauss-Khan regagne Paris. Quelques jours plus tard, sur le plateau de Claire Chazal, il reconnaît une relation "inappropriée" avec Nafissatou Diallo et nie en bloc toute violence ou contrainte.
Au civil, la première audience a lieu le 28 mars 2012. Le camp de DSK plaide l'immunité diplomatique, sans succès. Le 14 mai, il contre-attaque en portant plainte à son tour contre Nafissatou Diallo, qu'il accuse, dans un document de 17 pages, de "poursuites calomnieuses", d'"abus de procédure", de "diffamation" et de lui avoir "volontairement infligé une souffrance émotionnelle". Durant l'été, alors que sa rupture avec Anne Sinclair est confirmée, les négociations débutent en toute discrétion et durent jusqu'à la révélation de cet accord par le New York Times la semaine dernière. Ce 10 décembre, rideau sur cet incroyable feuilleton.
Les déboires de Dominique Strauss-Kahn avec la justice ne sont pourtant pas terminés. En marge de l'affaire du Sofitel est venue se greffer celle, tentaculaire, du Carlton de Lille. Affaire pour laquelle DSK est mis en examen pour "proxénétisme aggravé". Dans Le Point, Dominique Strauss-Kahn demandait à ce qu'on le laisse tranquille : "Rien ne justifie que je sois devenu l'objet d'une traque médiatique, expliquait-il. Je ne suis plus un politique, mais pas non plus un people." Chacune de ses sorties n'en est pas moins commentée...