Isabelle Adjani est cette semaine en couverture du magazine Elle... pour la 35e fois de sa carrière. C'est dire si l'actrice aux cinq César (un record) fascine toujours. Dans le long entretien accordé à Françoise-Marie Santucci, directrice de la rédaction du magazine, Isabelle évoque avec passion ses deux fils, Barnabé Nuytten et Gabriel-Kane Day-Lewis, mais également l'une de ses déceptions amoureuses avec le tout aussi mythique Jean-Michel Jarre.
À ce sujet, Isabelle Adjani se montrait déjà féroce dans le magazine Gala en 2014 : "Mes dernières désillusions étaient tout simplement liées à des erreurs de personne, ce qui n'est absolument pas le cas pour les pères de mes enfants." Le réalisateur de Camille Claudel, Bruno Nuytten, et l'acteur Daniel Day-Lewis apprécieront sans doute le compliment. Avec Jean-Michel Jarre, l'histoire d'amour tourne court en 2004 et la star de La Reine Margot révèle avoir été trompée dans Paris Match. Pour Elle, elle revient sur cet épisode douloureux et son choix d'en faire un "sujet de société" comme elle le résume avec humour : "Je devais régler ça, j'allais tomber malade sinon. S'exposer, ce n'est jamais une bonne façon. Mais j'ai rencontré des femmes qui m'ont dit merci. Il fallait quand même, vu mon orgueil, que ça devienne un sujet de société (rires) et de l'auto-victimisation peopolisée."
Je voulais au contraire me montrer la plus forte possible, quitte à être transgressive
Cette rupture a réveillé en Isabelle Adjani de vieilles blessures liés à son père : "J'ai eu à ce moment, et à d'autres d'ailleurs, la même sensation qu'avec mon père : comme si on voulait me mater, me dresser, et que ça continuerait tant que je ne céderais pas... Il m'a alors fallu recommencer la révolte de la 'fille' avec toutes choses inabouties, irrésolues, encore en cicatrisation. Car l'idée que je puisse subir à nouveau (...) m'était absolument insupportable. Je voulais au contraire me montrer la plus forte possible, quitte à être transgressive."
Par dépit amoureux, Isabelle Adjani ne cache pas s'être tournée vers la voyance : "J'ai essayé dans des situations de perdition amoureuses. (...) Mais je suis sûre qu'il y a réellement des gens connectés. Je crois que j'en fais partie mais je ne sais pas très comment me servir du branchement sans m'électrocuter." Elle a fait dix ans d'analyse – pour obtenir les clés – et pratique la méditation – un remède.
Isabelle Adjani dit avoir survécu à tout : "De mon enfance pas très heureuse, de la rumeur à la con du sida, de la méchanceté, de la trahison, de la jalousie..." Heureuse, "par moments", "tellement casanière" et "solitaire", Isabelle Adjani ne joue pas non plus le jeu des réseaux sociaux. Si Gabriel-Kane maîtrise à merveille Instagram, l'actrice ne s'y soumet pas. Elle porte un regard d'ailleurs étonnant sur ses consoeurs qui s'y montrent "au naturel" : "J'y vois quelque chose de très courageux, mais aussi une pointe de désespoir... C'est un peu : 'Regardez jusqu'où je suis capable d'aller pour me dépouiller d'une vanité qui me fait souffrir parce que ce n'est pas la mienne.' Ça m'étreint le coeur."
Elle, qui parle de "corps otage" pour décrire celui des actrices, a appris à se défaire de son image, du moins pour la caméra. "Je suis capable de laisser tomber l'impératif de l'image du corps en tant qu'actrice. Ces dernières années, je me suis contentée avec un certain courage, d'avoir le corps d'une femme qui vivait, bien ou mal, peu importe le regard des autres. Ce qui comptait pour moi, c'était de vivre dans mon corps tel qu'il était et non dans l'image de mon corps." C'est naturellement au cinéma, ainsi que sur arte, que l'on retrouvera Adjani cet automne dans Carole Matthieu de Louis-Julien Petit, adapté du roman Les Visages écrasés de Marin Ledun.
Isabelle Adjani dans Elle en kiosques depuis le 13 mai 2016.