Que s'est-il passé samedi 12 novembre au soir lorsque le chanteur d'Eagles of Death Metal (le groupe de rock qui jouait le 13 novembre 2015 lorsque trois terroristes ont fait irruption dans la salle en tuant 90 personnes) s'est rendu au Bataclan où Sting devait donner le premier concert depuis les attentats ?
Invité à l'initiative des associations de victimes, Jesse Hughes est aujourd'hui un indésirable au Bataclan. Jules Frutos, codirecteur du Bataclan, avait affirmé qu'il ne ferait plus jamais rejouer le groupe américain dans sa salle. Mais samedi, après le concert de réouverture, il a confirmé avoir viré manu militari Hughes et un de ses musiciens, venus assister au show de Sting. Une version contestée par le manager du groupe, qui traite au passage Frutos de "lâche". Autant dire que ce dimanche 13 novembre, à l'heure des hommages, le bad buzz ne passe pas auprès de certains fans, rescapés et familles de victimes
"Je suis pour l'éternité redevable au peuple français", a-t-il affirmé à Paris après l'hommage rendu dimanche aux 130 personnes tuées ainsi qu'aux blessés du 13 novembre 2015, saluant une ville qui "a réagi de la meilleure manière possible à cet acte vil et affreux". Tranchant avec ses nombreux propos polémiques depuis un an, le chanteur aux lunettes à verres rouges est apparu recueilli et silencieux lors de la cérémonie devant la salle.
"Ils avaient une couronne de fleurs bleu-blanc-rouge et ont fait la queue comme tout le monde pour se recueillir devant la plaque", a relaté à l'AFP le journaliste du Monde Daniel Psenny, lui-même blessé lors des attentats en secourant un Américain. Les photos l'attestant, Hughes a serré la main de François Hollande, ainsi que celle de Manuel Valls.
La veille, la direction du Bataclan a affirmé avoir interdit l'accès à la salle au chanteur du groupe. "Il y a des choses qu'on ne pardonne pas", a tranché Jules Frutos, en référence à des soupçons exprimés en mars par Jesse Hughes à l'encontre du service de sécurité de la salle. "Il s'est permis des déclarations tous les deux mois incroyablement fausses. Un délire total, accusant la sécurité d'avoir été complice des terroristes...", racontait Frutos la semaine précédant la réouverture.
Pointé du doigt, Jesse Hughes a répondu. "Je ne voulais pas voir le concert, je voulais simplement voir la salle ouverte", s'est défendu dimanche le chanteur. Le rockeur controversé, également connu pour ses positions conservatrices et pro-armes, a été défendu. "Jesse, qui est aussi une victime, avait peut-être besoin d'entrer dans le Bataclan mais ce n'était pas le bon moment", a estimé Caroline Langlade, présidente de l'association de victimes Life for Paris, alors que les membres des Eagles of Death Metal "serraient dans les bras chacune des victimes" présentes à la cérémonie. Nul doute que les musiciens sont aussi des victimes pour Daniel Psenny, qui reconnaît toutefois que "ça pose un problème d'accuser les gens et de faire des déclarations polémiques".
Jouant l'apaisement dimanche, Jules Frutos refusait d'évoquer le chanteur des EODM, préférant ne retenir que le "moment magique" avec Sting la veille.