"J'espère que mon célibat va s'arrêter un jour"... C'était il y a un an. Dans les pages du magazine TV Grandes Chaînes, alors qu'elle se livrait à un comparatif entre le personnage de Constance Meyer, qu'elle incarne depuis neuf ans dans la série La Stagiaire et la femme qu'elle est dans la vie, Michèle Bernier lançait cette petite phrase. Comme une blague, ou comme une bouteille à la mer, selon qu'on la considère comme un clown joyeux ou comme un clown triste, elle qui affirme qu'il y a peut-être, derrière son masque, une personne plus mélancolique que ce que les gens imaginent.
Comme tous les comédiens comiques, Michèle Bernier a sa part sombre. Héritée d'abord, peut-être, d'une enfance solitaire, elle qui n'a eu ni frère ni soeur et qui a passé "beaucoup de temps à attendre ses parents", ainsi qu'elle l'expliquait dans le podcast Dhombres et de lumières l'an dernier. "Je me mettais dans leur lit jusqu'à ce qu'ils rentrent, confiait-elle. Je me disais comme ça, je ne pourrais pas les louper mais évidemment je m'endormais. On n'avait pas de baby-sitter à l'époque. La dame qui me gardait restait jusqu'à 20 heures, elle me mettait au lit et elle s'en allait à 20h30 mais je faisais semblant de dormir. À leur retour, ils me portaient dans mon lit. Ma mère disait : "ce n'est pas possible, on ne va pas la porter comme ça jusqu'à 25 ans." "J'aurais tellement aimé avoir des frères et soeurs. Je ne suis pas une solitaire", lançait en écho à cette anecdote Michèle Bernier en 2018 au micro de Karine le Marchand dans son émission Une Ambition Intime.
À cette première blessure de l'enfance, est venue s'ajouter une inextinguible douleur, une cicatrice toujours béante : le suicide de sa mère Odile, partie sans laisser de motivations ni de lettre alors que sa fille n'avait que 29 ans ! "Les dernières années de sa vie, c'était une femme qui souffrait expliquait Michèle à Karine Le Marchand. Il n'y avait plus de fric, tout était tellement dur. [...] C'est un acte que personne n'a envie de comprendre. J'aime penser que c'est allé plus loin que ce qu'elle croyait, que c'était un appel au secours et qu'elle n'a pas mesuré... " (...) " Je me poserai toujours la question : pourquoi elle a voulu s'en aller ? Certainement que ça lui appartient ."
Terrible épreuve, pour un enfant que de ne pas savoir pourquoi sa mère a choisi de s'échapper de cette vie. Il faudra à Michèle Bernier des années de psychanalyses pour parvenir à surmonter, si tant est que cela soit possible, ce terrible traumatisme : "Je pense qu'elle me manquera toute ma vie, c'est comme ça". Une perte, comme un abandon...
Malheureusement pour la pensionnaires des Grosses Têtes, elle allait en connaître un autre... Moins dramatique, sans doute, mais douloureux, assurément...
1982 est une date clef dans la vie de Michèle Bernier. Cette année-là, à 26 ans, elle fait son entrée sur une scène qui va lancer sa carrière : celle du Petit Théâtre de Bouvard. Parallèlement, elle va aussi vivre un grand chamboulement puisqu'elle se met en couple avec un jeune comédien, humoriste comme elle, Bruno Gaccio. Lui aussi fait partie de la centaine d'artistes dont s'entoure Philippe Bouvard parmi lesquels les futurs Inconnus, Chevallier et Laspalès, Mimie Mathy, Jean-Marie-Bigard ou encore Muriel Robin.
"Avec Bruno, racontait Michèle Bernier à Gala en mars 2017, quand on s'est rencontrés, nous n'étions pas connus. Nous étions deux fortes personnalités qui construisaient leurs carrières. Il avait écrit une pièce, je voulais être actrice. Nous avons été amis pendant trois ou quatre ans avant de sortir ensemble. On ne pouvait pas se passer l'un de l'autre.". Plus tard, dans les pages du magazine S de Sophie Davant, la comédienne ajoutera : "Jeune, j'ai rêvé d'avoir un couple éternel... Mais j'ai rêvé." En effet, au bout de quinze ans, le rêve va prendre fin. Charlotte, leur première fille est déjà née. Michèle est enceinte de leur deuxième enfant, elle attend un garçon, c'est alors que Bruno Gaccio va la quitter, pour une autre.
"Michèle est la femme la plus intelligente que j'aie rencontrée. Dans le cas de notre séparation, c'est moi qui ai été con, donc il fallait qu'elle soit intelligente pour deux, expliquait Bruno Gaccio en février dernier à France Bleu. Elle a mis du temps. Les premiers temps, elle n'était pas très d'accord, mais elle a été extraordinaire et aujourd'hui c'est ma meilleure copine. Je serai toujours là pour elle."
"Je l'aimais tellement, avouait de son côté Michèle Bernier à Karine Le Marchand. Pour moi, c'était une histoire d'amour éternelle. Dans une séparation, tout le monde y laisse des plumes." Mais Michèle a pardonné. Au point que le couple incarne aujourd'hui un modèle de réussite après une séparation, eux qui sont devenus des amis et qui ont surtout toujours été unis pour leurs deux enfants, Charlotte, qui suit avec un immense succès les pas de sa maman, et Enzo qui pour l'heure reste dans l'ombre mais qui montre lui aussi un goût prononcé pour le monde du spectacle.
Mais si Bruno Gaccio a refait sa vie avec la comédienne d'Un si grand soleil, Anne-Laure Gruet, avec qui il vit officiellement en couple depuis 2012, Michèle Bernier, elle attend toujours de croiser son âme soeur. "Je voudrais une histoire d'amour pour la vie", se se désolait-elle en 2017 dans Gala, expliquant qu'elle avait certes connu beaucoup d'histoires mais qu'elle n'avait pas trouvé le bon. "Quand j'ai un compagnon qui ne fait pas partie du métier, les autres l'ignorent, résumait-elle. S'il est dans l'univers du spectacle et moins connu que moi, alors on le soupçonne d'être à mes côtés par intérêt. Les hommes viennent parce que je suis célèbre, que j'ai du succès et que je gagne bien ma vie. Et ils me quittent exactement pour les mêmes raisons. Au bout d'un moment, être "monsieur Bernier", ça lasse tout le monde." Résultat, il ne reste personne. Mais comme toujours, cette grande sentimentale donne le change, faisant sienne cette saillie de Claude Nougaro : "Quitte à être triste autant avoir l'air gaie."