Actrice lumineuse chez Rivette, Demis, Buñuel et Truffaut, femme de lettres, romancière, et de théâtre, Marie-France Pisier s'est éteinte le 24 avril 2011 dans sa résidence de Saint-Cyr-sur-Mer dans le Var. Le corps de la comédienne de 66 ans, qui souffrait d'un cancer du sein, a été retrouvé au fond de sa piscine, coincé dans une lourde chaise de fer forgé. L'enquête n'a pas permis de déterminer les circonstances exactes du décès. Trois ans plus tard, ses proches s'interrogent toujours...
Ni écrit ni testament
Dans une nouvelle biographie, intitulée La Véritable Marie-France Pisier, les journalistes Sophie Grassin et Marie-Elisabeth Rouchy se penchent sur la personnalité complexe de l'actrice marquée par le suicide de Georges Pisier et Paula Caucanas, ses parents. Les deux journalistes ont recueilli les témoignages de ses proches que la question du suicide divise. Certains, comme son mari Thierry Funck-Brentano, pensent que Marie-France Pisier a mis fin à ses jours, d'autres, comme leurs enfants, Mathieu (29 ans) et Iris (27 ans), qu'il s'agit d'un accident. Le magazine Gala publie quelques extraits bouleversants de ce livre et de ces témoignages.
"Marie-France est probablement morte d'une crise cardiaque, explique Thierry Funk-Brentano. On n'a pas retrouvé d'eau dans ses poumons et on sait que le mélange alcool et Ixprim, l'antalgique qu'elle prenait, met dans un état très particulier au contact de l'eau. [...] Marie-France n'était pas somnambule, elle n'est pas tombée dans la piscine en butant sur un obstacle sans qu'aucun de nos chiens n'aboie. Les policiers ont fait le test. Je n'ai rien vu venir. [...] Comme sa mère avant elle, je pense qu'elle a décidé d'interrompre son existence. Pas de lettre, pas de message, pas de signe avant-coureur, ni écrit ni testament. Rien. Elle s'est noyée avec son téléphone." Cette conviction n'est pas partagée par les enfants de Thierry et de l'actrice. Dans le livre, Mathieu, convaincu comme sa soeur Iris qu'il s'agit d'un accident, apporte cette nuance : "Sa mort est un accident en ce sens qu'elle n'était pas voulue. Ce soir-là, elle a bu quelques verres. [...] S'est-elle sentie happée par le drame de ses parents qu'elle rejetait mais dont je sens qu'il la fascinait aussi ? Je ne le saurai jamais." Gilles Pisier, son frère, ne croit pas non plus au suicide.
L'énigme
Ce double drame justement, le suicide à deux ans d'intervalle de ses parents dans les années 80, est-il revenu la hanter cette nuit de printemps ? Son premier mari, l'avocat Georges Kiejman, ne veut pas l'entendre : "Marie-France avait un rejet très violent à l'égard du suicide. D'un point de vue intellectuel, je ne peux imaginer qu'elle ait pu désirer cette mort." Reste cette enquête qui ne tranche pas : crise cardiaque, hydrocution, suicide ? "Elle n'a débouché sur rien, confirme le ténor du barreau. [...] Comme tout le monde, je me perds en conjectures." Pour l'une de ses amis, l'actrice n'aurait jamais imposé "ça" à ses enfants ou alors elle aurait fait ça "avec panache" et, surtout, elle aurait laissé une lettre.
Une célébration en l'honneur de Marie-France Pisier était organisée en l'église Saint-Roch à Paris, le 5 mai 2011. Ses proches et tous les hommes qui l'ont aimée, qu'elle a aimés, étaient présents : Georges Kiejman, Daniel Cohn-Bendit, Bernard-Henri Lévy... Quelques jours plutôt, son corps était inhumé dans la plus grande intimité à Sanary-sur-Mer. La comédienne repose désormais au cimetière communal de la Guicharde, dans le caveau de granit brut des Duhamel-Brentano, la famille de son mari Thierry Funck-Brentano.
Gala, en kiosques le 23 avril 2014.
La Véritable Marie-France Pisier de Sophie Grassin et Marie-Elisabeth Rouchy aux éditions Pygmalion, le 30 avril en librairies.