La semaine dernière (du 3 au 5 janvier 2019), les téléspectateurs américains découvraient Surviving R. Kelly, un nouveau documentaire diffusé en six parties sur la chaîne câblée Lifetime. Un programme glaçant et horrifique qui apporte un nouvel éclairage sur les accusations dont le chanteur R. Kelly (alias Robert Sylvester Kelly) fait l'objet depuis plusieurs années.
Accusé depuis plus de deux décennies d'entretenir des relations sexuelles, consenties ou forcées, avec plusieurs jeunes filles de moins de 16 ans alors qu'il est lui-même majeur, le chanteur de 51 ans a toujours nié les faits qui lui sont reprochés. En 2002, il avait fameusement été inculpé pour avoir filmé des actes sexuels entre lui et une jeune fille de 14 ans (la nièce de la chanteuse Sparkle), avant d'être finalement acquitté en 2008.
Dans Surviving R. Kelly, de nombreuses autres personnes qui ont côtoyé l'artiste controversé témoignent. D'anciennes choristes et danseuses, témoins de relations sexuelles avec d'autres mineures, ont pris la parole, assurant entre autres avoir surpris l'artiste en train d'avoir des rapports avec sa protégée Aaliyah (morte en 2001), âgée de 15 ans à l'époque des faits. R. Kelly, alors âgé de 28 ans, avait fameusement et illégalement épousé la regrettée chanteuse en 1994. Les noces, toujours démenties par le principal intéressé, avaient été annulées quelques semaines plus tard par la famille d'Aaliyah.
Dans le documentaire, d'autres femmes (dont d'ex-petites amies et l'ancienne femme du chanteur et mère de ses enfants, Andrea Kelly) présentent R. Kelly comme manipulateur, violent et porté sur les très jeunes femmes, desquelles il exigeait notamment qu'elles l'appellent "daddy" (papa). Lizzette Martinez, qui l'a rencontré à 17 ans alors que lui approchait de la trentaine, assure avoir été victime de harcèlement mental et d'"agressions physiques" au cours de leur relation, qui a duré plusieurs années. "En abusant de moi de cette façon, il m'a volé ma vie", dit-elle dans le documentaire, réalisé par Dream Hampton. "Je ne pense pas qu'il comprenne à quel point nous, jeunes filles, sommes impressionnables et à quel point ces épisodes sont traumatiques pour nous. Ils vous changent à jamais."
Pour la première fois, plusieurs stars ayant côtoyé R. Kelly ont pris la parole. John Legend est ainsi l'un des rares artistes qui a accepté de témoigner ouvertement. "Il a provoqué la douleur de tellement de personnes", a confié l'époux de Chrissy Teigen. Sur Twitter, le jeune père de famille a également justifié sa décision d'intervenir dans le documentaire, là où notamment Céline Dion, Jay-Z et Lady Gaga (qui ont aussi tous travaillé avec le R. Kelly) ont fermement refusé. "À tous ceux qui me disent à quel point je suis courageux d'apparaître dans le documentaire, cela ne me semblait pas risqué du tout. Je crois ces femmes et je me fous de protéger un violeur d'enfants en série. Décision facile", a écrit John Legend le 4 janvier.
D'autres artistes ont dénoncé R. Kelly au cours de la diffusion de ce documentaire, comme Ne-Yo (qui avait fait la première partie du chanteur en 2007 et appelle désormais à le boycotter), Meek Mill, Tank ("ce documentaire me rend malade") ou Chance the Rapper. Comme John Legend, ce dernier (qui a collaboré avec R. Kelly en 2015 sur le titre Somewhere in Paradise) est brièvement intervenu dans Surviving R. Kelly. "La vérité est que tous ceux d'entre nous qui ont ignoré les histoires de R. Kelly ou qui ont cru qu'il était en train d'être attaqué par le système (comme le sont souvent les hommes noirs) le faisaient au détriment des femmes et des filles noires. Je m'excuse auprès de tous les survivantes d'avoir travaillé avec lui et d'avoir pris autant de temps pour en parler", a par la suite écrit Chance the Rapper sur Twitter.
En juillet 2017, une longue enquête publiée par le site Buzzfeed accusait R. Kelly d'entretenir "une secte sexuelle" où plusieurs dizaines de jeunes femmes seraient détenues contre leur volonté, la plupart d'entre elles ayant été victimes d'un lavage de cerveau, et "dressées" pour satisfaire le moindre de ses fantasmes sexuels. Des familles de victimes se mobilisent encore aujourd'hui pour tenter de renouer le contact avec elles.