En occident, Rania de Jordanie représente, entre autres, le glamour, la sophistication, la diplomatie, l'engagement pour de nobles causes. L'ancienne première dame Carla Bruni-Sarkozy avait d'ailleurs révélé qu'elle était l'une de ses têtes couronnées préférées. Dans son portrait par L'Obs, le n° du 14 octobre 2021, un autre visage est révélé, non pas sa face cachée mais celle que les Jordaniens eux-mêmes observent. L'épouse du roi Abdallah II n'est pas une simple première dame du pays. Si son intelligence et sa beauté ne sont pas du tout contestés, son influence dans les jeux de pouvoir montre à quel point cette femme de 51 ans n'est pas un faire-valoir qui brille lors des soirées de l'ambassadeur.
Très dense et riche en informations sur le contexte géopolitique dans la région du Proche-Orient, ce long article de L'Obs s'attarde sur la position de Rania de Jordanie au sein même de son pays et dans les contrées voisines. Parmi les angles abordés, il y a le contraste entre son engagement humanitaire et sa vie fastueuse. Pour illustrer le décalage, des chiffres : "25 % de chômeurs et 1 million d'habitants sous le seuil de pauvreté dans ce pays d'aujourd'hui 10 millions d'habitants", écrit L'Obs. Difficile de ne pas être gênés par cet état des lieux et le quarantième anniversaire de la reine en 2010, organisé dans un désert au sud du pays, le Wadi Rim : "600 invités venus du monde entier, dont Bill Clinton, Oprah Winfrey et Tony Blair, une parade militaire, des camions-citernes qui arrosaient le sol pour que les invités ne soient pas incommodés par la poussière et le sable − alors que le pays traversait une période de sécheresse..."
L'image de reine à la taille mannequin, diplômée en économie de l'université américaine du Caire qui s'implique dans de nombreuses causes comme l'éducation tout en arborant des ensembles chic fait grincer des dents parmi la population. Elle voit plus en elle une "Marie-Antoinette aux tenues hors de prix" ou encore "la reine aux sacs à main" pour ne pas dire "l'étrangère"...
Mère du prince héritier Hussein (27 ans), des princesses Iman (25 ans) et Salma (21 ans) et du jeune prince Hashem (16 ans), Rania al-Yassin vient d'une famille d'origine palestinienne. Avec son mariage avec le roi Abdallah, "le régime pense que son origine palestinienne sera un atout, un moyen d'apaiser les tensions permanentes au sein d'une population divisée entre les Jordaniens de souche (appelés aussi 'Transjordaniens') et les Palestiniens, arrivés en masse dans le pays lors de la création d'Israël, puis à la suite de la guerre de Six-Jours en 1967". Mais comme l'explique ensuite en détails L'Obs, la fracture entre ces deux peuples de Jordanie ne sera pas réparée. Trop proche de la dynastie hachémite, trop palestinienne, Rania de Jordanie est sans cesse renvoyée à ses origines et à son mariage, sans parler de sa relation difficile avec la reine mère Noor, veuve du roi Hussein de Jordanie dont elle est la quatrième épouse et donc belle-mère du roi Abdallah. Une situation complexe dans laquelle Rania tient une place délicate...