L'histoire à rebondissements de France 24 n'a pas fini de nous étonner : dans la guerre des chefs qui secoue actuellement la SAEF (société holding qui comprend France 24, TV5 et RFI), une nouvelle tête vient de tomber.
Pour rappel, la SAEF (Société de l'Audiovisuel Extérieure de la France) comprend les médias sous l'égide du gouvernement qui sont en charge du rayonnement hexagonal de l'information. Créée il y a deux ans, elle compte pour responsables Alain de Pouzilhac (PDG) et l'ex-journaliste Christine Ockrent nommée par Nicolas Sarkozy en tant que DG (mais rétrogradée à DG déléguée au début de l'été 2010). Le poste d'Ockrent a toujours provoqué des remous : sa légitimité a été remise en cause (France 24 dépend du ministère des affaires étrangères et donc... de son compagnon Bernard Kouchner qui l'aurait pistonné), elle est accusée par des syndicats d'être à l'origine de diverses humiliations auprès de salariés et est également soupçonnée d'être (partiellement) responsable du déficit budgétaire, imputable au trop grand nombre de journalistes. Autre problème, un souci d'ego : Alain de Pouzilhac et Christine Ockrent se détestent et se mènent une guerre de pouvoir sans merci qui n'est pas sans rappeler celle que se menaient Nonce Paolini et Axel Duroux chez TF1 (avant que Duroux claque la porte...).
Le soutien d'Ockrent ? Viré !
Résultat chez France 24 : une atmosphère socio-économique particulièrement pesante pour les 280 journalistes et autres syndicats qui réclament des réponses. Des réponses sur les dérives budgétaires et des réponses sur les postes menacés.
En effet, dans la guéguerre Pouzilhac-Ockrent, deux personnes ont été particulièrement visées : Ockrent a d'abord pris la liberté de refuser une promotion à Albert Ripamonti (directeur adjoint de la rédaction et surtout... allié de Pouzilhac) sans consulter le PDG. Ce dernier a répondu à cette offensive en réintégrant son poulain et en mettant Vincent Giret (directeur de la rédaction et surtout... soutien d'Ockrent) sur la sellette (mise à pied). Le sort de Giret paraissait alors scellé depuis quelques jours et l'entretien pré-licenciement semblait une évidence. Pourtant, la direction se refusait à fournir une réponse officielle... C'est néanmoins maitenant chose faite.
Ockrent et Pouzilhac ont tous les deux perdu leur poulain...
Lors d'un comité d'entreprise extraordinaire qui s'est tenu ce jour, mardi 14 septembre, le licenciement de Vincent Giret a été confirmé. Les syndicats ont réclamé des explications qui ne leur ont pas encore été fournies (une prochaine réunion se tiendra le 24 septembre pour en débattre). Le cas de Giret alourdit désormais un peu plus le climat après que Ripamonti, un des pères fondateurs de la chaîne, a choisi de quitter France 24... pour débarquer sur I-Télé. Il remplace ainsi Thierry Thuillier, lui-même parti sur France 2 pour remplacer Arlette Chabot à la direction de l'information (qui oeuvre désormais sur la chaîne Public Sénat, en plus de l'émission A vous de juger sur France 2).
Quels recours possibles ?
Jusqu'à présent, les menaces des syndicats n'ont toujours pas porté leurs fruits : ils avaient menacé une grève, elle a finalement été suspendue. Il était question de voter une motion de défiance à l'encontre des deux têtes pensantes, cela n'a finalement pas été le cas. Dernièrement, les syndicats songeaient à user de leur droit d'alerte (auprès du Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail), mais il n'y a eu aucun écho à ce sujet. Que faire pour faire entendre leur détresse ?
Quant à la direction, si elle avait déjà annoncé que les finances seraient rééquilibrées sans licenciement (sans compter celui de Giret...), elle a néanmoins fait état aujourd'hui "d'arbitrages douloureux pour 2011". Faut-il s'attendre à un futur écrémage des effectifs ?
Aucune précision supplémentaire n'a été apportée, mais les départs successifs de Ripamonti et Giret (licencié !) ne vont pas calmer les tensions...
Allyson Jouin-Claude