Manaudou : 'Je ne veux pas qu'on dise à Manon 'ta maman, elle était chiante' !'

Elle est le glorieux passé de la natation française féminine, presque sa glorieuse seconde naissance, et maintenant elle a "hâte de faire partie de la nouvelle natation française féminine" : quelques heures après son retour plus que prometteur à la compétition, lors du meeting américain d'Athens où elle a signé deux victoires (et un chrono digne d'un titre de championne de France en prime), Laure Manaudou fait profil bas. Mais ne se défile pas.

"J'avais peur de fuir [les journalistes] comme je le faisais avant. Je me suis revue trois ou quatre ans plus tôt et je me suis dit : "Non, ce n'est pas ce que je suis et ce n'est pas ce que j'ai envie d'être auprès du public." Je n'ai pas envie de paraître arrogante, capricieuse ou méchante... Il faut que j'apprenne à gérer les médias, à ne pas me sentir agressée, ça fait partie de ma vie", explique-t-elle à L'Equipe, qui lui fait prolonger ses confidences.

"Il faut que je réussisse à renouer des liens"

Symbole de cette attitude irréprochable et de ce désir de self control, des excuses inattendues. L'officialisation de son retour, qui s'était faite en France en plein Open EDF quelques jours après avoir renagé à Carcassonne, avait suscité des réactions contrastées. La Niçoise Camille Muffat, l'actuelle patronne de la natation française féminine, avait peu goûté d'être assaillie de questions sur Laure Manaudou alors qu'elle claquait des chronos de folie (assommant le 200 et le 400), et son agacement ne se cachait pas. Désireuse de revenir dans le jeu et de s'intégrer dans la sphère des nageuses actuelles, Laure Manaudou est consciente du handicap inhérent à son come-back et joue la politique de la main tendue : "Il faut que je réussisse à renouer des liens. Je m'excuse, d'ailleurs, par rapport à ce qui s'est passé à l'Open EDF, quand j'ai annoncé mon retour. Camille Muffat, par exemple, elle faisait des temps énormes et on ne lui a parlé que d'une chose : du retour de Laure Manaudou. J'étais gênée."

"Je veux que Manon me voit comme je suis"

Ce come-back événement oblige même L'Equipe à verser un peu dans le people (rien de mal, Purepeople.com verse bien un peu dans le sport !) en reliant cette nouvelle vie sportive à la nouvelle vie personnelle de la nageuse, heureuse en amour avec Frédérick Bousquet et maman d'une petite Manon de 15 mois qui joue un grand rôle : "Je ne veux plus faire d'erreurs. Je veux que Manon me voie comme je suis et pas qu'on lui dise : "Oh là là, ta maman, elle était chiante..." Ça m'a assagie. Avant, je marchais la tête baissée, je ne regardais personne." Des propos sur la maternité qui font écho à ceux de Fred Bousquet sur leur fillette, lui qui évoquait récemment son désir de Jeux Olympiques 2012 en famille (avec Laure et Florent Manaudou) : "[...] pour que notre fille, plus tard, puisse se dire : "J'ai été aux Jeux Olympiques de Londres, ma maman et mon papa étaient dans le bassin"."

"Ç'a été très dur de perdre tous ces kilos, j'ai arrêté de compter à 18"

Manon, justement, a attendu sa maman en France pendant que celle-ci choisissait de signer son retour aux Etats-Unis, là où "personne ne la connaît", là où la petite famille a "trouvé une petite maison sympa en dehors du campus, à Auburn, une maison normale, quoi". C'est dans ce confort américain et intime que s'est façonné, depuis septembre 2010 et sous la houlette du coach australo-américain de Fred, Brett Hawke, son retour. Pas facilement, d'ailleurs. D'abord parce qu'il y a eu l'effet post-grossesse : "Ç'a été très dur de perdre tous ces kilos, parce que j'en ai pris... Pfff... Enfin, j'ai arrêté de compter à 18, donc je pense qu'il y avait plus de 20. Ç'a été difficile de retrouver la tonicité pour me sentir bien dans l'eau. Les deux premiers mois, je pleurais dans mes lunettes." Et ensuite parce que les sensations ont mis du temps à revenir.

Mais si, pour l'ancienne Laure, "c'était tellement facile" de nager sous l'égide de son ancien mentor Philippe Lucas, pour la nouvelle Laure, la cellule familiale est un facteur déterminant, tant dans la motivation que dans l'organisation du travail : "je nage la moitié de ce que je faisais avant, mais les chronos sont là, donc je passe moins de temps à la piscine et plus avec ma famille." Fred Bousquet, son amoureux, est là aussi pour la soutenir et la regonfler si nécessaire, comme ce fut le cas les premiers mois : "Il m'a remise sur les rails, m'a motivée. S'il ne m'avait pas poussée tous les jours à aller à l'entraînement et à me dire : "Il y a Pellegrini et Muffat dans les lignes d'eau à côté de toi" à chacune de mes séries, je ne pense pas que j'en serais là aujourd'hui."

Aujourd'hui, Laure Manaudou s'affiche, pour l'instant, sereine et épanouie. Et vise ouvertement les JO de Londres, dont les qualifications se joueront en mars 2012 lors de Championnats de France sous haute tension. Pour l'heure, c'est à distance, de chez ses parents à Ambérieu-en-Bugey où elle devrait rester jusqu'à la fin de l'été, qu'elle suivra les performances de son chéri, Fred, et de son frère, Florent, aux Mondiaux de Shanghai, à partir du 24 juillet.