Pierre Richard lors de la soirée d'ouverture du Festival Lumière à Lyon le 14 octobre 2013© BestImage
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Pierre Richard, 79 ans, fait l'actualité avec son one-man show Pierre Richard III qu'il emmène à travers la France (mais après il arrête, car "c'est trop fatigant"), ou pour son vin. Il a en effet ouvert fin octobre Le P'tit Comptoir du Grand Blond dans le 11e arrondissement parisien où l'on peut déguster ses vins, AOC Corbières, et qui n'est autre que la cave du vigneron qu'il est depuis 1986. Il devrait d'ailleurs l'inaugurer début décembre. La figure de la comédie française va néanmoins parler longuement de cinéma, même si le septième art le snobe un peu, dixit CinéTéléObs qui l'a interviewé.
D'une famille rigoriste à prisonnier de son personnage
Au fil de ce long entretien, Pierre Richard revient sur sa famille, très "rigoriste" : "Psychorigide même. Chez nous, tout le monde était polytechnicien. Et moi, je ne foutais rien : le vilain petit canard." Ses parents s'étant séparés, il a vécu dans deux milieux très différents. Il distingue, d'un côté, son père, grand bourgeois du Nord, chef d'industrie dans l'acier, avec qui il vivait dans son château de Valenciennes, et de l'autre, sa mère, la bohème qui faisait la polenta tous les dimanches : "C'est ce qui m'a donné ce sens de l'équilibre, ou plutôt du déséquilibre." L'acteur se souviendra : "Enfant, un chauffeur m'accompagnait à l'école. Et je lui demandais toujours de s'arrêter 50 mètres plus tôt ; j'avais honte qu'il me dépose devant mes copains."
En 1970, il joue son premier rôle principal, dans le film Le Distrait, qu'il a lui-même réalisé : "Pierre, tu n'es pas acteur, lui disait Yves Robert. Tu n'as aucune place dans le cinéma français. T'es un personnage, alors fais ton cinéma toi-même." Un conseil qu'il a donc scrupuleusement suivi. Ses films, c'était lui, dira-t-il. Il regrette que la presse ne l'ait pas encouragé à continuer avec ses films qui critiquaient le système comme Les Malheurs d'Alfred, mais avoue qu'il s'est ensuite perdu tout seul, et non dans les films que d'autres ont réalisés : "J'aime bien Je suis timide mais je me soigne, en revanche, les suivants..." Pas facile pour lui de sortir de son personnage, et quand il essaie autre chose, il se plante : "Quand Les Mille et une recettes du cuisinier amoureux (1996) sortait à Paris, des gens dans la rue me demandaient : 'Quand est-ce qu'on vous retrouve au cinéma ?' Ça ne les intéressait pas de me voir là-dedans. J'étais prisonnier de mon personnage et j'en ai souffert. Je le suis moins maintenant."
Francis Veber
Le Jouet (1976) est considéré comme l'un de ses meilleurs films. Il est réalisé par Francis Veber et Pierre Richard trouve lui-même que c'est le plus beau : "Peut-être aussi celui qui lui a le plus échappé. C'est un film de gauche qui dénonce la lâcheté des journalistes, l'oppression d'un puissant homme de presse, inspiré de Marcel Dassault... Or Veber est tout sauf un homme de gauche."
Avec Veber, Pierre Richard deviendra une figure de la comédie avec La Chèvre, Les Compères, Les Fugitifs.... D'abord François Perrin, il deviendra ensuite François Pignon, un nom resté emblématique : "Quand, par la suite, [Francis Veber] a refilé ces noms à tout le monde dans chacun de ses films, ça m'a un peu déçu. Étant donné les gros succès que j'avais rencontrés avec, j'estimais, peut-être prétentieusement, qu'ils m'appartenaient un peu." Louant le talent de Veber, il ne s'empêche pas pour autant de le critiquer : "Ce sont des horlogeries, les scénarios de Veber - je ne parle pas de ses derniers qui sont trop déshumanisés." Il rectifie une chose au passage. Dans son autobiographie, Francis Veber a dit de lui qu'il était radin : "S'il y a un mec généreux au point d'être fauché, c'est bien moi."
Gérard Depardieu et les autres
Évidemment, au cours de l'interview, Pierre Richard n'évitera pas le sujet de la star controversée Gérard Depardieu : Le journaliste lui demande s'il est vrai que, lorsqu'il est parti filmer Fidel Castro pour son documentaire, Depardieu lui a dit : "T'as pas honte d'aller chez un dictateur"... Il réagit : "L'enfoiré ! Et dix ans plus tard, il faisait du commerce de pétrole avec lui. Gérard va là où est l'argent. Il est hors norme, Gérard. On ne peut donc pas le juger comme un type normal. J'ai beaucoup de tendresse pour lui. Ça ne m'empêche pas de me dire qu'il charrie un peu. Comme quand il affirme que Poutine est un démocrate. Il est comme ça ; on le prend ou on ne le prend pas. Moi, je le prends. [...] On ne se voit jamais. Il n'y a pas longtemps, j'ai voulu téléphoner à Jugnot. Ça décroche et j'entends 'Oh, mon coco !' Je m'étais trompé de Gérard. Je lui dis : 'T'es où ?' 'En Ouzbékistan'. Il m'a tenu la jambe un quart d'heure. Je me disais 'Putain, l'Ouzbékistan, je vais en avoir pour 3000 euros !'. Ça n'a pas loupé : le lendemain, je n'avais plus de forfait."
La Chèvre, où il donne la réplique à Depardieu, avait au départ été écrit pour Lino Ventura et lui, mais ça ne se fera pas. Il a failli tourner avec Patrick Dewaere aussi dans La Carapate, mais il ne sent pas le personnage et se retire du projet. Et puis il y a eu Coluche : "On avait trouvé un projet qui nous plaisait bien, et Coluche est mort trois mois plus tard. C'était une idée de Bernard Haller. L'histoire d'un juif et d'un épicier raciste, convaincu d'avoir tué sa femme, qui se cachent dans une ferme pendant l'Occupation. Leur hôte les convainc que la meilleure planque, c'est de se montrer et ils mettent au point un numéro de music-hall de faux frères siamois. Seulement, celui-ci remporte un succès fou."
Pierre Richard va faire une comédie avec Stéphane Robelin qui l'avait dirigé dans Et si on vivait tous ensemble ?, un film qu'il aime beaucoup, et il vient de tourner avec Vincent Lannoo dans Les Âmes de papier (en salles le 25 décembre) : "Si le cinéma revient, très bien. Sinon, j'irai vivre au Brésil."
D'une famille rigoriste à prisonnier de son personnage
Au fil de ce long entretien, Pierre Richard revient sur sa famille, très "rigoriste" : "Psychorigide même. Chez nous, tout le monde était polytechnicien. Et moi, je ne foutais rien : le vilain petit canard." Ses parents s'étant séparés, il a vécu dans deux milieux très différents. Il distingue, d'un côté, son père, grand bourgeois du Nord, chef d'industrie dans l'acier, avec qui il vivait dans son château de Valenciennes, et de l'autre, sa mère, la bohème qui faisait la polenta tous les dimanches : "C'est ce qui m'a donné ce sens de l'équilibre, ou plutôt du déséquilibre." L'acteur se souviendra : "Enfant, un chauffeur m'accompagnait à l'école. Et je lui demandais toujours de s'arrêter 50 mètres plus tôt ; j'avais honte qu'il me dépose devant mes copains."
En 1970, il joue son premier rôle principal, dans le film Le Distrait, qu'il a lui-même réalisé : "Pierre, tu n'es pas acteur, lui disait Yves Robert. Tu n'as aucune place dans le cinéma français. T'es un personnage, alors fais ton cinéma toi-même." Un conseil qu'il a donc scrupuleusement suivi. Ses films, c'était lui, dira-t-il. Il regrette que la presse ne l'ait pas encouragé à continuer avec ses films qui critiquaient le système comme Les Malheurs d'Alfred, mais avoue qu'il s'est ensuite perdu tout seul, et non dans les films que d'autres ont réalisés : "J'aime bien Je suis timide mais je me soigne, en revanche, les suivants..." Pas facile pour lui de sortir de son personnage, et quand il essaie autre chose, il se plante : "Quand Les Mille et une recettes du cuisinier amoureux (1996) sortait à Paris, des gens dans la rue me demandaient : 'Quand est-ce qu'on vous retrouve au cinéma ?' Ça ne les intéressait pas de me voir là-dedans. J'étais prisonnier de mon personnage et j'en ai souffert. Je le suis moins maintenant."
Francis Veber
Le Jouet (1976) est considéré comme l'un de ses meilleurs films. Il est réalisé par Francis Veber et Pierre Richard trouve lui-même que c'est le plus beau : "Peut-être aussi celui qui lui a le plus échappé. C'est un film de gauche qui dénonce la lâcheté des journalistes, l'oppression d'un puissant homme de presse, inspiré de Marcel Dassault... Or Veber est tout sauf un homme de gauche."
Avec Veber, Pierre Richard deviendra une figure de la comédie avec La Chèvre, Les Compères, Les Fugitifs.... D'abord François Perrin, il deviendra ensuite François Pignon, un nom resté emblématique : "Quand, par la suite, [Francis Veber] a refilé ces noms à tout le monde dans chacun de ses films, ça m'a un peu déçu. Étant donné les gros succès que j'avais rencontrés avec, j'estimais, peut-être prétentieusement, qu'ils m'appartenaient un peu." Louant le talent de Veber, il ne s'empêche pas pour autant de le critiquer : "Ce sont des horlogeries, les scénarios de Veber - je ne parle pas de ses derniers qui sont trop déshumanisés." Il rectifie une chose au passage. Dans son autobiographie, Francis Veber a dit de lui qu'il était radin : "S'il y a un mec généreux au point d'être fauché, c'est bien moi."
Gérard Depardieu et les autres
Évidemment, au cours de l'interview, Pierre Richard n'évitera pas le sujet de la star controversée Gérard Depardieu : Le journaliste lui demande s'il est vrai que, lorsqu'il est parti filmer Fidel Castro pour son documentaire, Depardieu lui a dit : "T'as pas honte d'aller chez un dictateur"... Il réagit : "L'enfoiré ! Et dix ans plus tard, il faisait du commerce de pétrole avec lui. Gérard va là où est l'argent. Il est hors norme, Gérard. On ne peut donc pas le juger comme un type normal. J'ai beaucoup de tendresse pour lui. Ça ne m'empêche pas de me dire qu'il charrie un peu. Comme quand il affirme que Poutine est un démocrate. Il est comme ça ; on le prend ou on ne le prend pas. Moi, je le prends. [...] On ne se voit jamais. Il n'y a pas longtemps, j'ai voulu téléphoner à Jugnot. Ça décroche et j'entends 'Oh, mon coco !' Je m'étais trompé de Gérard. Je lui dis : 'T'es où ?' 'En Ouzbékistan'. Il m'a tenu la jambe un quart d'heure. Je me disais 'Putain, l'Ouzbékistan, je vais en avoir pour 3000 euros !'. Ça n'a pas loupé : le lendemain, je n'avais plus de forfait."
La Chèvre, où il donne la réplique à Depardieu, avait au départ été écrit pour Lino Ventura et lui, mais ça ne se fera pas. Il a failli tourner avec Patrick Dewaere aussi dans La Carapate, mais il ne sent pas le personnage et se retire du projet. Et puis il y a eu Coluche : "On avait trouvé un projet qui nous plaisait bien, et Coluche est mort trois mois plus tard. C'était une idée de Bernard Haller. L'histoire d'un juif et d'un épicier raciste, convaincu d'avoir tué sa femme, qui se cachent dans une ferme pendant l'Occupation. Leur hôte les convainc que la meilleure planque, c'est de se montrer et ils mettent au point un numéro de music-hall de faux frères siamois. Seulement, celui-ci remporte un succès fou."
Pierre Richard va faire une comédie avec Stéphane Robelin qui l'avait dirigé dans Et si on vivait tous ensemble ?, un film qu'il aime beaucoup, et il vient de tourner avec Vincent Lannoo dans Les Âmes de papier (en salles le 25 décembre) : "Si le cinéma revient, très bien. Sinon, j'irai vivre au Brésil."