Les secrets royaux sont parmi les mieux gardés, mais parfois rien ne peut empêcher qu'ils soient exposés : après la révélation d'étonnantes photos de jeunesse inédites la montrant avec sa soeur la princesse Elizabeth (future Elizabeth II) lors de leurs représentations théâtrales à Windsor en pleine Seconde Guerre mondiale, les dernières volontés de la princesse Margaret vont-elles faire surface ? Si la publication, par un ami loyal des filles du roi George VI, de l'album photo privé n'avait pas fait débat, la requête concernant le testament de la princesse Margaret, émanant d'un enfant prétendument illégitime, fait quelques remous...
À 58 ans, Robert Brown, comptable sur l'île de Jersey, n'a qu'une idée en tête : persuadé d'être le fils caché de la défunte princesse Margaret du Royaume-Uni, décédée en 2002 à l'âge de 71 ans, il entend bien avoir accès à son testament, scellé à sa mort, et y découvrir que la famille royale a caché la grossesse de celle-ci. Et après avoir essuyé un premier échec, la justice britannique lui a redonné espoir en autorisant en décembre 2013 son appel contre la précédente décision lui barrant la route.
Justice Phillips, de la Haute Cour de Londres, a estimé pour justifier la nouvelle décision rendue que le dossier soulevait "d'importantes questions de principe et de pratique" concernant la transparence de la justice et l'intérêt général. Et Robert Brown peut poursuivre son entreprise visant à percer à jour un "processus judiciaire secret" ayant conduit à sceller les testaments royaux.
L'individu, né en 1955, pense être le fils de la princesse Margaret (qui renonçait plus tard cette année-là à épouser Peter Townsend au terme de longs et houleux débats) et, possiblement, de Robin Douglas-Home, un écrivain et aristocrate écossais mort en 1968. Il avance que les derniers temps de la grossesse secrète de la princesse ont été camouflés grâce au recours à une doublure et que lui-même a été exilé au Kenya, où il a été élevé par Cynthia (mannequin pour un styliste prisé de la princesse) et Douglas Brown. Au Guardian, il avait précédemment affirmé que ceux-ci ne le traitaient pas comme leurs autres enfants et qu'on oubliait parfois son anniversaire.
Selon lui, les documents auxquels on tente de l'empêcher d'avoir accès peuvent prouver que Buckingham Palace, l'attorney general de la couronne et un juge confirmé se sont entendus pour passer le testament de Margaret, où figurent peut-être des détails concernant sa naissance, sous silence. Selon son acte de naissance, Robert Brown aurait vu le jour le 5 janvier 1955 à Nairobi, capitale du Kenya, mais sa naissance n'a pas été formellement enregistrée avant le 2 février et il suppose qu'un conseil a tenu une réunion le jour où il est venu au monde.
Lors d'une précédente audience, Robert Brown, qui avait saisi la Haute Cour de Londres en 2006 et 2007, s'était heurté à la défense de la famille royale, qui avait battu en brèche ces allégations d'un "fantaisiste cherchant à repaître son obsession personnelle". Débouté, il était revenu à la charge au nom de la liberté de l'information, en affirmant que la présidente de la branche des affaires familiales de la Haute Cour de Londres au moment des faits, Dame Elizabeth Butler-Sloss, avait donné son approbation à l'arrangement secret sur la procédure de mise au secret des testaments royaux. Un acte qui n'a jamais été rendu public, ce qui soulève selon le demandeur des questions quant à son caractère licite et constitutionnel.
Contrairement à l'avis défavorable précédemment rendu, qui considérait que les informations auxquels il cherchait à accéder relevaient du secret de la correspondance royale et non de la liberté de l'information, la Haute Cour de Londres vient de lui accorder le droit de plaider sa cause. "Je suis ravi, a commenté Robert Brown au sujet de ce rebondissement. C'est un jour important pour les principes fondamentaux de la justice et de la bonne marche de la loi. Historiquement, il apparaît clairement que la monarchie ne devrait pas entretenir de communications secrètes avec la justice."
Quant à sa prétendue filiation royale, qui en ferait le demi-frère de David Armstrong-Jones, vicomte Linley et de Lady Sarah Chatto, les deux enfants nés du mariage (en 1960) de la princesse Margaret avec le photographe Antony Armstrong-Jones, il déclare : "Par chance, je ne suis pas cinglé. Ou bien j'ai raison, ou bien je me trompe." Une affaire de principe, donc. Et non d'héritage ?