Décrit comme une démonstration de force par Le Parisien, le meeting d'Eric Zemmour à Villepinte (Seine-Saint-Denis) ce 5 décembre 2021 a fait, comme prévu, couler beaucoup d'encre. Accueilli par une foule en liesse - 15 000 personnes selon les médias -, le candidat à la présidentielle a été aussi bousculé dès son arrivée, juste avant de monter en tribune. Selon son entourage, il aurait été blessé au poignet et a 9 jours d'interruption temporaire de travail. Mais cela n'a pas entamé son sourire sur la scène, affichant en même temps un nouveau look : des petites lunettes à montures fines - pour mieux lire son prompteur ? Le Zemmour 2.0 a fait le show, affirmant ses positions et ses soutiens, un meeting toutefois marqué par des incidents violents.
"La France est de retour", a lancé Éric Zemmour à ses milliers de partisans après s'être déclaré officiellement mardi avec une vidéo très controversé. Crédité de 13% des voix pour la présidentielle d'avril, il se présente comme le "petit grain de sable" de la "machine" présidentielle, le candidat d'extrême droite s'est adressé à ceux qui ont "bravé le politiquement correct, les menaces de l'extrême gauche, la haine des médias", rapporte l'AFP. "Impossible n'est pas français", a répété le candidat avec une expression attribuée à Napoléon devenue son slogan de campagne, devant ses militants qui scandaient "Zemmour président" ou "on est chez nous".
Avec comme logo un rameau d'olivier - le sens du nom Zemmour en berbère -, son nouveau parti a été baptisé "Reconquête !", un nom qui peut évoquer la "reconquista" chrétienne espagnole au Moyen Âge. L'adhésion a été fixée à 30 euros. Eric Zemmour a fustigé "le mondialisme", "le vivre-ensemble" et "l'immigration de masse". Mais a contesté être "fasciste", se disant "le seul à défendre la liberté de penser", ou "misogyne", en rendant hommage à sa mère qui lui a "transmis un amour immodéré de la France". Même récusation d'être "raciste" alors qu'il veut "défendre un héritage". Le candidat a salué le "courage" de ses troupes alors que "la meute est désormais lancée à (s)es trousses". "Mes adversaires veulent ma mort politique, les journalistes veulent ma mort sociale, et les djihadistes veulent ma mort tout court". Il s'est dit "prêt à prendre les manettes" du pays pour répondre à deux "craintes" qui "hantent les Français", "celle du grand déclassement (...) et celle du grand remplacement avec l'islamisation de la France et l'immigration de masse". Il a promis une "immigration zéro" et la "réindustrialisation" de la France.
Eric Zemmour, dont le calendrier était calqué sur le congrès des LR, a aussi attaqué la nouvelle candidate de LR Valérie Pécresse qui, comme son "mentor" Jacques Chirac, "promettra tout et n'obtiendra rien". Le financier Charles Gave a retiré son soutien et le souverainiste Philippe de Villiers n'était pas présent dimanche. Mais plusieurs personnalités de la Manif pour tous, opposées au mariage homosexuel, sont venues : l'ex-député conservateur Jean-Frédéric Poisson s'est félicité d'avoir avec d'autres "installé les enjeux de civilisation au coeur de la campagne présidentielle". Laurence Trochu, présidente du Mouvement conservateur, associé jusqu'à présent à LR, a dénoncé la "décomposition idéologique de la droite" tandis que la figure des "gilets jaunes" Jacline Mouraud a dénoncé la "mondialisation heureuse, cheval de Troie des étrangers". Eric Zemmour se rendra mardi 7 décembre en région lyonnaise.
Son meeting a été marqué par une série d'incidents. Avant que le meeting ne démarre, une équipe de l'émission "Quotidien" a été huée par le public, avant d'être mise brièvement à l'abri, a constaté l'AFP. Des militants de SOS Racisme menant une action qui se voulait "non violente" ont eux été agressés par des participants. Cinq personnes ont été blessées, dont deux prises en charge par les pompiers, selon l'association. La gauche et des membres de la majorité présidentielle ont pointé la responsabilité d'Eric Zemmour qui donne "une légitimité à cette violence". Ces personnes de SOS Racisme "n'avaient pas à être là, il ne faut pas venir faire de provocation", a réagi Antoine Diers, de l'équipe de campagne d'Eric Zemmour.
Un dispositif de sécurité dense avait été déployé à Villepinte. Des tensions ont néanmoins éclaté à la mi-journée entre des dizaines d'opposants à la venue d'Éric Zemmour et les forces de l'ordre, devant la gare du RER. Il y a eu au total 57 interpellations et 79 verbalisations pour manifestation interdite, selon la préfecture de police en fin de journée. A Paris, quelque 2 200 manifestants selon la préfecture, 10 000 selon les organisateurs, se sont rassemblés dans le calme pour dénoncer le discours à leurs yeux "raciste" d'Eric Zemmour, à l'appel d'une cinquantaine de syndicats, partis et associations. Le meeting permet de mesurer les ralliements, alors que l'organisation, menée notamment par Sarah Knafo, est critiquée en interne pour sa fragilité et que des militants plus radicaux ont intégré la campagne.