Un homme KO, sonné, consterné. Voilà le portrait de François Hollande que dressent ses proches depuis la sortie du livre assassin de Valérie Trierweiler, Merci pour ce moment, qui s'arrache actuellement en librairies. Une vengeance glaciale de la part de son ex-compagne - l'excellent journaliste Serge Raffy écrit "une forme de crime passionnel" - à laquelle le chef de l'État répond enfin dans une longue interview accordée au Nouvel observateur. S'il n'a pas souhaité revenir sur le terrain privé et sur son histoire d'amour avec l'ex-première dame trompée, il évoque surtout la polémique des "sans-dents" qui l'a choqué comme bon nombre de Français...
"Un coup porté à ma vie toute entière"
C'est l'attaque la plus politique de l'ouvrage et celle qui fait le plus mal pour un homme de gauche. Accusé par Valérie Trierweiler de mépriser les pauvres, qu'il appellerait les "sans-dents" en privé, François Hollande s'est vu obligé de répondre aux Français. Touché dans son âme de socialiste, le chef d'État crie au mensonge. "Cette attaque sur les pauvres, les plus démunis, je l'ai vécue comme un coup porté à ma vie tout entière, a confié le président qui rappelle l'ancienneté de son engagement auprès des plus précaires. "Dans toutes mes fonctions, dans tous mes mandats, je n'ai pensé qu'à aider, qu'à représenter ceux qui souffrent. Je n'ai jamais été du côté des puissants, même si je ne suis pas leur ennemi, mais je sais d'où je viens", a ajouté celui qui voulait s'attaquer au "monde de la finance" durant la campagne de 2012.
Président "normal" et antithèse du bling-bling, François Hollande remet également les choses au clair en rappelant ses origines modestes. "Vous croyez que j'ai oublié d'où je viens ? Mon grand-père maternel, petit tailleur d'origine savoyarde, vivait avec sa famille dans un modeste deux-pièces à Paris. Mon grand-père paternel, lui, était instituteur, issu d'une famille de paysans pauvres du Nord de la France. Et vous croyez que je pourrais mépriser le milieu d'où je tiens mes racines, ma raison de vivre ?", s'est indigné le président qui assure avoir "soutenu" et "aidé" des gens en difficulté qui avaient du "mal à soigner leurs dents", un signe de "pire misère".
"Ce que je vis n'est pas agréable, mais que voulez-vous ?"
Historiquement bas dans les sondages, contesté dans son propre camp, attaqué sur le terrain personnel... François Hollande vit assurément l'une des périodes les plus difficiles de sa vie et de son quinquennat. Mais le président ne compte ni baisser les bras ni se plaindre. "Ce que je vis en ce moment n'est pas agréable, mais que voulez-vous ? Que j'aille pleurer sur mon sort devant les Français, que je pleurniche ? Je ne suis pas un démagogue, ni un comédien. Les Français attendent autre chose de moi. Ils veulent des résultats. Mes états d'âme ne les intéressent pas. Ils ont raison. Je veux rester dans l'authenticité de ce que je suis. Je n'ai jamais triché, jamais cherché à faire croire que j'étais quelqu'un d'autre que ce que je suis, a-t-il assuré. Mais je ne veux pas qu'on puisse dire ou écrire que je me moque de la douleur sociale, car c'est un mensonge qui me blesse."
Avant de l'évoquer clairement dans le Nouvel Obs, François Hollande avait déjà brièvement répondu à la polémique sur les "sans-dents". "Je n'accepterai jamais que puisse être mis en cause ce qui est l'engagement de toute ma vie", avait déclaré le président en plein sommet de l'Otan à Newport (Grande-Bretagne) le 5 septembre. Quelques jours plus tôt, Valérie Trierweiler avait eu des mots extrêmement durs sur son supposé mépris des pauvres. "Il s'est présenté comme l'homme qui n'aime pas les riches. En réalité, le président n'aime pas les pauvres. Lui, l'homme de gauche, dit en privé : 'les sans-dents', très fier de son trait d'humour", avait écrit l'ex-première dame trompée.
Un carton en librairie
Tandis que Jean-Luc Mélenchon en a profité pour dire mercredi que François Hollande "pleurniche", le livre de Valérie Trierweiler continue de se vendre comme des petits pains. Écrit et imprimé dans le plus grand secret, tiré à 200 000 copies, l'ouvrage de l'ex-première dame s'est déjà vendu à 145 000 exemplaires - 131 000 pour l'édition papier - selon l'institut Gfk cité par l'AFP. Il a été réimprimé dans trois imprimeries du groupe CPI, dans l'Eure, le Cher et la Sarthe.
Dans l'opinion publique, Valérie Trierweiler connaît toutefois moins de succès. Une nette majorité de Français désapprouvent ainsi la publication de son livre vengeance. 56% des sondés pensent ainsi qu'"elle a eu tort d'écrire cet ouvrage", 41% qu'elle a "eu raison", selon un sondage Harris Interactive pour VSD. Une maigre consolation pour François Hollande...
L'intégralité de l'interview est à retrouver dans Le Nouvel observateur du 11 septembre 2014.