Judith Godrèche a observé avec attention l'ouverture de la 77e édition du Festival de Cannes, elle qui a braqué la lumière des César jusqu'au sein de l'Assemblée nationale au sujet des violences sexuelles dans le milieu du cinéma. Elle était donc ravie de voir des femmes puissantes à l'honneur pour le premier jour : la maîtresse de cérémonie Camille Cottin, la présidente du jury Greta Gerwig ou encore Meryl Streep honorée. Une joie que celle qui présente une oeuvre à Cannes dans la section Un certain regard agrémente de critiques, preuve qu'il reste encore du chemin à parcourir.
Réalisatrice d'un court métrage baptisé Moi aussi dans lequel apparaissent 1000 femmes et hommes qui ont témoigné auprès d'elle d'abus et agressions sexuels, Judith Godrèche filme aussi sa fille Tess - née de sa relation passée avec Maurice Barthélémy. Au Parisien, elle explique la démarche de choisir de filmer son enfant : "Elle est surtout là pour incarner la jeunesse à qui on s'adresse."
Après avoir balayé les rumeurs de "liste" d'agresseurs dans le monde du cinéma - "on sait que ça ne viendrait pas de Mediapart" -, Judith Godrèche se réjouit de la tribune des 100 personnalités masculines en soutien du mouvement #MeToo, regrettant de ne pas être assez accueillante sur les initiatives comme celles-ci : "Mon instant, c'est de penser qu'a priori, la plupart des hommes sont malgré tout des alliés, ou tout du moins on l'espère."
Des alliés qu'elle ne veut pas transformer en assistés. La veille sur les ondes de France Inter, Judith Godrèche avait réagi sur le fait d'accompagner les hommes dans cette démarche contre les violences. De quoi faire le lien avec la parole récente, sur la même radio, d'un grand acteur français qui n'a pas peur d'affirmer ses opinions dans les médias : Vincent Lindon, présent au Festival de Cannes où il a présenté Le Deuxième Acte. Il avait appelé les hommes à "accompagner les femmes" dans le mouvement #MeToo au cinéma et réclamé une "feuille de route" pour être guidé.
Dans Le téléphone sonne au micro de Fabienne Sintes, Judith Godrèche a ainsi expliqué, avec une touche d'ironie : "Je ne sais pas, sur un tournage, ouvrir les yeux.... Il est compliqué de ne pas voir. L'identification est un drôle de truc. C'est la capacité de s'identifier à toutes et tous sans se dire 'je ne peux pas m'identifier à elle car c'est une femme.' Il devrait être possible de s'identifier à tous les genres humains. (...) Je pense que personne n'a besoin de feuille de route pour savoir, il me semble. C'est d'ailleurs pour cela qu'il n'y a pas besoin de formation pour savoir qu'abuser quelqu'un sexuellement, ce n'est pas bien. On n'a pas besoin d'être formé pour savoir qu'il ne faut pas violer."
Judith Godrèche et Vincent Lindon ont en commun d'avoir travaillé avec Benoît Jacquot et Jacques Doillon, réalisateurs que la comédienne a accusé d'agressions sexuelles alors qu'elle était mineure. Sans les citer, l'acteur avait expliqué à propos du combat de sa consoeur à Ouest France : "Ce fléau ne doit plus être la seule préoccupation des femmes, nous les hommes devons nous inviter dans la lutte résolument, sans défaillir sur un si long chemin".