Le dîner de cons, Les bronzés, Un indien est dans la ville, Le père Noël est une ordure... La carrière de Thierry Lhermitte dans le monde de la comédie est assurément l'une des plus impressionnantes. Autant dire que lorsqu'il nous ait proposé de rencontrer l'acteur de 63 ans, l'honneur ressenti est à la hauteur du monument transgénérationnel qu'est Thierry Lhermitte.
À l'affiche de Ma famille t'adore déjà, l'acteur incarne un père de famille "dingue odieux, tyran domestique et épouvantable". Désiré par l'humoriste et metteur en scène Jérôme Commandeur, il n'a pas hésité une seconde. "Quand c'est bien écrit, on fonce tête baissée et on ne rajoute rien", affirme-t-il. Le voilà en train de jouer le beau-papa, lui qui connaît bien ce rôle pour avoir eu trois enfants. On lui demande alors comment il avait vécu la situation, les premières fois où ses enfants ont présenté leur conjoint(e)s. "Plutôt bien, répond Thierry Lhermitte. Je n'ai pas le souvenir d'avoir eu d'hostilité. Quand on est parent, la chose principale qu'on se dit, c'est est-ce que ça va faire du bien à l'enfant ? Jamais je me suis dit, 'oula, catastrophe'." Et de rajouter : "Je m'entends bien avec les conjoints de mes enfants."
L'avis de mes parents sur mes compagnes m'importait peu
On lui demande alors comment, lui, il avait présenté sa première amoureuse à ses parents. Il se fait cash : "Je ne me souviens plus et mes parents étaient séparés. Et puis leur avis m'importait peu. J'ai fait un mariage où on était quatre. Elle [le personnage de Déborah François dans le film, NDRL] a besoin de l'assentiment de ses parents. Moi, je n'en avais pas besoin." La discussion embraye alors sur les mensonges qu'Eva (Déborah François) multiplie pour que ses parents adoptent son petit ami joué par Arthur Dupont. "J'ai déjà menti dans ma vie, mais pas pour présenter ma compagne comme dans la situation de Déborah François, non", argue l'acteur, pour qui "Eva ment par peur de l'opinion de ses parents". Ses trois enfants n'ont pas eu besoin de non plus. "Aucun problème pour présenter des conjoint(e)s, ça c'est clair, surtout mon fils Victor", s'amuse le père comblé.
Et s'ils ont souffert de l'image populaire de leur père, l'intéressé répond. "Si bien sûr, ils ont souffert du fait d'être fils de. Bien que moi j'ai une image plutôt sympa. C'est pénible et difficile de se dire qu'on peut être fréquenté parce que son père ou sa mère est connu. C'est vraiment le cas quand on a une image plus controversée, je pense aux enfants de Serge Gainsbourg et de Jane Birkin qui en ont bavé", croit savoir Thierry Lhermitte.
Avec le Splendid, on a ni interdiction, ni obligation de se retrouver
Très loquace et sympathique, l'acteur du Splendid a un mot sur tout. Il nous avoue que Five est sa comédie préférée ("un pur chef-d'oeuvre"), qu'il "admirait les Poiret, Serreau, Francis Blanche, Marx Brothers, Woody Allen..." et se souvient de ses débuts, comment il s'est retrouvé "intimidé" devant Philippe Noiret.
Aurait-il réussi à faire carrière aujourd'hui, à l'heure du 2.0. "Quelque part c'est plus facile et compliqué à la fois. Nous quand on a démarré, il y avait peut-être 3 chaînes tout au plus. Là où il fallait bien briller à l'époque, c'était dans les cafés-théâtres. Je pense qu'aujourd'hui, si on commençait avec le Splendid, on ferait Youtube. Tout va plus vite. On est connu plus vite et on disparaît plus vite", philosophe-t-il avec simplicité. Lui, accompagné des Clavier, Chazel, Jugnot et autre Michel Blanc, a commencé "petit à petit" et mis "7-8 ans" à construire quelque chose de stable dans la comédie. "On a commencé par des petits cafés-théâtres de 50 places, avant d'acheter les nôtres", se souvient-il, sans nostalgie.
Sa carrière, il la doit principalement aux succès du Splendid et les cartons populaires aujourd'hui cultes que la troupe a signés. "On a ni interdiction, ni obligation de se retrouver, explique Lhermitte quant à d'hypothétiques retrouvailles. S'il y a une bonne idée, on le fera. On a beaucoup de plaisir à travailler et jouer ensemble. Ce serait marrant de faire quelque chose de radicalement différent. Mais est-ce qu'on est assez créatif aujourd'hui pour faire quelque chose de plus original que les suites de ce qu'on a fait avant..."
"Des scénarios, je n'en reçois plus beaucoup, nous dit-il justement. C'est une question d'âge, de mode aussi. Et puis il y a également le fait qu'on me propose également des films qui ne sont pas des comédies." En effet, entre L'Affaire Gordji : Histoire d'une cohabitation, Quai d'Orsay ou encore La Clef, il a prouvé ces dernières années qu'il pouvait briller ailleurs que dans le registre du rire. Et puis il y a le fait que la comédie a changé. "On a ri de tout et aujourd'hui on ne peut pas rire de tout parce que des gens avec des mauvaises intentions se sont emparés de la comédie", déplore l'acteur.
Il n'y a pas eu un seul de nos films qui a eu des bonnes critiques
Expérimenté, Thierry Lhermitte a osé durant toute sa carrière. Il a multiplié les étiquettes, touché à tout. "Produire, je l'ai fait, je ne le fais plus. Producteur, je l'ai fait pendant quinze ans, et ça m'a pris trop de temps. J'ai trop d'autre choses à faire dans la vie que de faire ça en plus, assure-t-il en écho au fait que Dany Boon produit Ma famille t'adore déjà. Metteur en scène, je n'ai jamais eu l'intention et je ne le ferais pas."
Aujourd'hui, l'homme sait ce qu'il veut. Tel un vieux sage, il égraine ses conseils et livre sa vision des choses. Notamment lorsqu'on le lance sur la critique. "Il n'y a pas eu un seul de nos films qui a eu des bonnes critiques. Et ceux qui l'encensent aujourd'hui, Le Père Noël compris, nous ont traînés dans la boue au moment de la sortie. C'est une constance de la critique, lâche-t-il avec un brin de sarcasme. C'est spécial d'aller critiquer un film qu'on irait pas voir... Moi, par exemple, je n'aime pas la nourriture hindou. C'est comme si on me demandait d'aller faire une critique sur un restaurant hindou. La critique n'a aucune importance, dans un sens comme dans l'autre. Au début, on la croit, et c'est blessant. Mais au point de vue des entrées, ça n'a aucune influence positive ou négative. Il n'y a que pour les films exceptionnellement bons, sur lequel le bouche-à-oreille vous urge d'aller voir ça, qu'on le voit. Pour le reste, l'influence est neutre. On a envie malgré des mauvaises critiques, et on n'a pas envie malgré de bonnes critiques." Et il conclut : "Je ne lis pas les critiques. J'ai appris qu'il ne fallait lire ni les bonnes, ni les mauvaises."
Ma famille t'adore déjà, en salles à partir du 9 novembre.