Mercredi 26 février, France 2 dévoilait un nouveau numéro de La Parenthèse inattendue. À la campagne, Frédéric Lopez a reçu cette semaine trois invités aux parcours totalement différents : le chanteur Corneille, le comédien Michel Leeb et la sportive Marion Bartoli. Entre des confidences amusantes et d'autres pleines d'émotion, le chanteur a évoqué le pire moment de sa vie, le massacre de sa famille au Rwanda.
Si ce moment effroyablement douloureux est à présent derrière lui et qu'il a longtemps suivi une thérapie afin de mieux vivre avec ses terribles souvenirs, Corneille n'a pas hésité à raconter dans les détails cette macables nuit d'avril 1994. C'est à l'âge de 7 ans, après avoir vécu en Allemagne, que Corneille et sa famille se sont installés dans le Sud du Rwanda.
Malgré les vives tensions qui règnent dans le pays à cette époque-là, Corneille, âgé de 17 ans au moment des faits, explique que sa famille et lui n'ont pas vraiment peur. "Je savais qu'il y avait un problème entre les gens du Nord et les gens du Sud. L'inconscience de mon père par rapport à tout ça n'était pas légitime et je lui ai longtemps reproché", raconte-t-il avant de relater la terrible nuit du 15 au 16 avril.
"Il y a des gens armés qui se sont introduits chez nous. Ils nous ont demandé de nous asseoir dans le salon. Il y avait mes deux petits frères, ma petite soeur, mon père et ma mère. Je ne sais pas comment l'expliquer mais j'étais persuadé que n'y passerais pas. Ils ont commencé à tirer, ça a dû se passer en deux ou trois minutes. Dans ma tête, ça a pris une seconde", décrit-il froidement. Si le Forever Gentlemen n'a pas subi le même destin que ses proches, c'est uniquement grâce à un réflexe de survie... et à une panne d'électricité.
"Ça s'est passé un peu dans le noir complet. J'ai sauté derrière un canapé qui était à côté de moi. Ils ont tiré sur tout le monde et ils sont partis en courant. Ils ne sont pas restés trop longtemps. J'imagine qu'ils n'ont pas eu le temps de vérifier que tout le monde était mort. Moi, je suis sorti de ma cachette et je pensais, pendant l'heure qui a suivi, que j'étais mort avec eux. La première chose que j'ai faite, c'est d'aller dans la salle de bain de mes parents et je me suis regardé dans le miroir pour vérifier que j'étais vivant. Je suis devenu un bloc de glace, je ne sentais plus rien, je ne pleurais pas, j'étais dans un état de choc total", conclut-il. Toute la nuit, l'adolescent qu'il était est resté dans cette maison et ce n'est que le lendemain qu'il a "fait l'effort de regarder [sa] famille, une fraction de seconde." "Personne n'est préparé à ça. Plutôt que de me dire 'qu'est-ce qui me suis arrivé ?!', je me suis dit 'Moi je suis vivant'." Une belle leçon de courage.
La seule chose que Corneille a ensuite emportée avec lui, ce sont les cartes de visite que contenaient le portefeuille de sa mère. Un nouveau réflexe de survie pour tenter de trouver de l'aide. Puis est venu le temps de l'exode, qui a duré plusieurs mois, et en août 1994, il est arrivé à Düsseldorf en Allemagne.
La suite, on la connaît, celui qui soutient aujourd'hui Garou au côté de Gérald de Palmas lors des battles de The Voice 3 fait ses débuts au Canada et sort son premier album, Parce qu'on vient de loin, sorti en 2002. Après avoir vécu l'enfer, Corneille peut donc se targuer d'avoir réalisé son rêve : devenir chanteur. Une chose dont sa famille serait certainement fière.
Sarah Rahimipour