Elle était la grande absente de la cérémonie d'abdication de son père Juan Carlos et de celle de prestation de serment de son frère, Felipe VI, le nouveau roi d'Espagne. Et pour cause. L'infante Cristina (49 ans) a été mise à l'écart, en décembre 2011, de l'agenda de la Maison royale depuis qu'a éclaté le scandale Noos au coeur duquel se trouve son mari, Iñaki Urdangarin, mis en examen pour six chefs d'inculpation. Il encourt plus de vingt ans de prison pour le détournement de 6,1 millions d'euros de fonds publics. Le juge José Castro, du tribunal de Palma de Majorque, a clos son enquête mercredi (25 juin) et maintenu l'inculpation de Cristina d'Espagne pour "deux délits présumés contre le Trésor public et un pour blanchiment de capitaux".
Le juge a rendu publique sa décision de 167 pages dans laquelle il justifie le maintien de l'inculpation, prononcée en janvier, par le fait que les délits de fraudes fiscales dont il soupçonne Iñaki Urdangarin "auraient difficilement pu être commis, sans, au moins, la connaissance et l'accord de son épouse, même si, face à l'extérieur, elle gardait l'attitude propre à ceux qui regardent ailleurs". Selon l'AFP, le juge a logiquement maintenu l'inculpation de l'époux de Cristina, soupçonné de corruption, notamment pour "fraude, escroquerie et trafic d'influence". En tout, seize personnes demeurent inculpées, tandis que le juge a accordé un non-lieu provisoire, entre autres, à Carlos Garcia Revenga, secrétaire particulier et homme de confiance de Cristina et de sa soeur Elena. Ce denier avait dû s'expliquer sur son rôle dans l'institut Noos.
Recours, la belle affaire...
Ce scandale a très sérieusement dégradé l'image de la famille royale d'Espagne. Si procès de Cristina il y avait, il s'agirait du premier coup (très) rude porté au règne de Felipe VI qui, en prêtant serment devant sa belle Letizia, a promis de suivre une conduite "honnête et transparente". Ce jour-là, la Maison royale avait dit ignorer où se trouvait l'infante et, toujours selon l'AFP, avait préféré ne pas répondre lorsqu'on lui demandait si cette absence équivalait à une condamnation avant même la décision de la justice. Les conclusions du juge Castro rendues, la Maison Royal s'est fendue d'un court communiqué affirmant son "respect total envers les décisions de justice". Sans autre commentaire...
Le procès de Cristina n'est cependant pas encore programmé. Sa défense a fait appel ainsi que le procureur anticorruption qui estime les indices insuffisants. Pour le juge, cela ne fait pourtant aucun doute : il existe des "indices suffisants" pour montrer que l'infante "s'est enrichie" et "a donné à son mari les moyens de le faire, par sa collaboration silencieuse". La décision finale d'un procès sera prise par le tribunal provincial, une instance supérieure.
Dépenses personnelles douteuses
Depuis la mise en examen d'Iñaki Urdangarin, en décembre 2011, le juge s'intéresse à l'infante Cristina. Que savait-elle des activités de son mari que l'on accuse d'avoir détourné des millions d'argent public grâce à l'institut Noos, une société de mécénat, qu'il a présidé de 2003 à 2006 ? La soeur du nouveau roi a d'abord été mise en examen pour trafic d'influence au printemps 2013, laquelle a été annulée suite à la demande du parquet. Le magistrat s'est alors intéressé aux soupçons de fraude fiscale et blanchiment de capitaux qui pèsent sur Cristina via la société Aizoon, qu'elle détient à 50% avec son mari, laquelle aurait reçu environ 1 million d'euros d'argent détourné. Le juge a épluché les comptes de la société, les dépenses du couple et a remarqué, par exemple, un voyage en famille à Rio pour environ 5 000 euros, l'achat d'un tableau de 4 400 euros ou encore 436 703 euros pour la rénovation de la villa familiale à Barcelone... Le tout "imputé à la comptabilité d'Aizoon", qui aurait servi de "société écran" pour détourner l'argent provenant de Noos.
En février dernier, Cristina avait été questionnée pendant plusieurs heures par le juge Castro. Selon Manuel Delgado, l'avocat de l'association de gauche Frente Civico, qui s'est exprimé devant la presse lors d'une suspension de séance, le juge lui a fait subir un interrogatoire costaud, lui posant "des questions rigoureuses". L'infante a donné "95%" de "réponses évasives". Cet avocat l'a trouvée "sereine, tranquille, bien préparée". Cristina a affirmé "avoir confiance" en son mari, tout en prenant ses distances avec ses activités. Elle a quitté le tribunal de Palma comme elle y était arrivée, sans un mot, avec le sourire.
Iñaki Urdangarin, ancien champion olympique de handball reconverti en homme d'affaires, et Cristina d'Espagne sont écartés depuis deux ans et demi des activités de la Maison royale. La paria de la Casa Real a pourtant fait une rarissime apparition officielle auprès des siens lors de la cérémonie commémorant les 50 ans de la disparition du roi Paul Ier de Grèce, le 6 mars 2014, à la nécropole royale du domaine Tatoï, au nord d'Athènes. Son époux absent, Cristina a déposé une gerbe de fleurs au nom de son couple et de leurs quatre enfants : Valentín (14 ans), Miguel (12 ans) et Irene (9 ans) et Pablo (3 ans).